juillet 2007

Les dires de la violence

Texte de présentation

Quelle est la relation existant entre la violence et les symboles avec lesquels se construit la littérature en Amérique Latine ? La réponse à cette question peut nous permettre de décortiquer quelques enjeux qui sont à la base de la production sociale, culturelle et littéraire latino-américaines. Depuis l’avènement de la modernité en Occident, la violence a été considérée comme le principal ennemi de la civilisation, de l’humanisme, de la culture et de la société. Néanmoins, chaque acte fondateur – soit-il politique ou culturel, exécutif ou symbolique – implique des éléments violents, une rupture vis-à-vis l’ordre établi. Si l’on pense juste à quelques romans parmi les plus représentatifs de la littérature hispano-américaine, on peut s’apercevoir facilement comment la violence représentée fait face à l’ordre régnant. Soit-t-il social, religieux, économique, politique ou autre, la littérature est l’espace où se nouent les liens qui n’ont pas leur place dans le discours institutionnel. Malgré cette omniprésence et l’abondance de travaux sur la violence dans les études culturelles et les études littéraires, peu nombreux sont les travaux qui se sont penchés sur l’articulation de la violence comme force de transgression, de sédition et sur la façon dont la symbolisation de cette violence se construit et les conséquences qu’engendrent ces constructions narratives dans l’imaginaire social.

Mais pourquoi la violence ? La violence est un instrument conceptuel très particulier ; d’abord elle n’est pas abstraite mais visible, représentable, quantifiable, personnalisable, subjectivable ; elle peut échapper à des conceptualisations binaires et elle a une grande historicité. Depuis le commencement de l’écriture, la violence constitue l’un des instruments les plus utilisés pour définir et fonder une culture et son environnement d’exclusion. De plus, la violence nous permet de mettre en relation la politique, l’État, la justice, la société, l’individu et la culture avec la littérature.

Les textes réunis dans ce numéro visent à examiner les enjeux qui tournent autour de la violence dans un environnement largement littéraire en tenant compte du contexte de production. Spécifiquement, il s’agit d’amorcer une réflexion sur les mécanismes de la violence dans le discours littéraire latino-américain. Il s’agit d’interroger attentivement les figures de résistance à l’ordre, les processus de formation et de relâchement des tensions qui se produisent au cours d’un récit et finalement les mécanismes de transition de la violence exécutive vers le symbolique. Dans cette optique, ces textes se penchent sur l’analyse de la violence à la fois sur le plan du discours, de la représentation et des personnages pour ainsi décortiquer le mode opératoire de la violence dans le texte et dans la lecture de ce texte. L’hypothèse qui gravite autour de cette question est qu’en analysant ces textes à partir de la violence comme outil critique, il est possible d’envisager une ligne de lecture qui nous permette de décortiquer les dispositifs de représentation de la violence et leur influence directe sur l’imaginaire social, particulièrement dans le cadre du contexte latino-Américain.

Image de couverture
Inconnu.
Éditeur·rice(s)
  • L’équipe de Post-Scriptum
Révision
  • L’équipe de Post-Scriptum
Mise en ligne
Laurence Sylvain