La créativité artificielle

Conversation avec une IA sur la création artificielle

L’art ne reproduit pas le visible; il rend visible. 
Paul Klee

Introduction au débat sur la créativité de la machine

L’essor de l’intelligence artificielle, en particulier celui des grands modèles de langage (GML), soulève de nombreuses interrogations dans le domaine culturel. Par exemple, en Amérique du Nord, l’industrie du film s’est vue complètement interrompue au début de l’été 2023 à la suite d’une grève organisée par le syndicat des scénaristes et acteurs américains (SAG-AFTRA)1. Au cœur des préoccupations émerge la crainte de voir l’artisanat humain se réduire en raison d’un usage excessif de l’IA, qu’il s’agisse de la simulation des voix, de l’écriture de scénarios ou du clonage virtuel d’acteurs. Ce type de situation multiplie la présence de discours alarmistes autour de l’IA. Parmi ces assertions, certaines prévoient une obsolescence humaine imminente dans des secteurs d’activité caractéristiques de l’expression humaine, notamment les disciplines artistiques2.

Cela dit, avant de se prononcer sur les possibilités créatives de nos programmes informatiques, il est nécessaire de questionner la véritable nature des progrès techniques de l’IA. À ce sujet, l’épicentre de cette polémique – la capacité d’un programme informatique à réaliser des productions égales ou supérieures à celles des humains – n’a rien d’inédit3. Bien au contraire, ce questionnement ainsi que les préoccupations qui l’accompagnent ont surgi à chaque avancée technologique de l’IA depuis ses premiers développements. 

Il en a été ainsi en 1997, lorsque Deep Blue, le super ordinateur développé par IBM, a vaincu le champion du monde des échecs, Garry Kasparov. Cette victoire a marqué un premier tournant dans cette grande tentative de faire acquérir à l’IA les capacités de l’être humain. Cependant, malgré ce premier succès, la création d’un programme informatique capable de gagner aux échecs n’était pas encore envisagée comme une preuve irréfutable que l’ordinateur réussissait à mieux raisonner que l’être humain. À l’époque, plusieurs penseurs, chercheurs et Kasparov lui-même soutiendront cette position.

Kasparov wrote that computer scientists should try « to develop a program that played chess by thinking like a human […]. Surely this would be far more fruitful avenues of investigation than creating, as we doing, ever-faster algorithms to run on ever-faster hardware. »
(Miller 2019, 48) 

Pour ce dernier, Deep Blue contenait une forme d’intelligence, mais celle-ci était si rigide qu’en regard de l’intelligence humaine la différence demeurait évidente : « “I could sense – I could smell – a new kind of intelligence,” he famously said. “It’s a weird kind, an inefficient, inflexible kind” » (Kasparov cité dans Miller 2019, 46).

Pourtant, depuis Deep Blue, les développements techniques n’ont pas cessé de progresser, augmentant le champ d’action de ces programmes informatiques. À cet effet, des activités considérées longtemps comme trop complexes pour un logiciel ont été ciblées par les grandes entreprises en technologie. En 2011, le programme Watson d’IBM remporte le jeu Jeopardy! contre deux anciens champions. En 2016, AlphaGo, développé par l’entreprise DeepMind, défait Lee Se-dol, considéré comme un des meilleurs joueurs de go de la dernière décennie. La même année, le court-métrage Sunspring, écrit par une IA qui « demande » à être appelée Benjamin4, provoque la surprise lors du festival de films Sci-Fi-London. Deux ans plus tard, en 2018, Ross Goodwin incorpore une IA à une voiture, permettant à cette dernière d’écrire le livre 1 the Road qui pastiche le style de la Beat Generation. Puis, en 2021, l’orchestre suisse Nexus interprète la Symphonie n° 10 de Beethoven composée par une IA à l’aide de fragments laissés par le célèbre compositeur. En somme, stratégie, communication, imitation et découverte sont quelques-uns des territoires humains « explorés » par cette industrie technologique depuis la naissance du terme « intelligence artificielle » en 19565

Or, malgré toutes ces réelles avancées technologiques, certains discours médiatiques semblent exagérer les possibilités et la nature de l’IA6. Ainsi, face à une multiplication de productions algorithmiques, il devient essentiel de repenser la manière dont nous interrogeons l’IA, non pas en tant que sujet créateur autonome, mais en tant qu’outil façonné par des intentions humaines. Plutôt que de s’attarder sur la capacité de l’IA à imiter certaines facultés humaines, l’enjeu central consiste à distinguer les ressorts de la créativité humaine de ceux des productions produites par l’intelligence artificielle générative. Ce déplacement de perspective permet de dépasser les discours sensationnalistes afin d’engager une réflexion plus concrète sur la nature, les limites et les enjeux propres à la création médiée par les GML7. Dans cette optique, il est nécessaire de délimiter un cadre d’analyse dans le but d’évaluer la production créative engendrée à partir de l’IA. Subséquemment, étant donnée sa notoriété dans le monde et sa capacité à produire des textes sur demande, ChatGPT apparait comme un point de départ approprié pour cette recherche8. De plus, afin de circonscrire davantage cette réflexion, il sera principalement question d’étudier le potentiel créatif littéraire de ce GML. À partir de ce dispositif d’analyse, il sera plus aisé d’étudier le produit, puis le processus créatif de l’IA par rapport à celui d’un esprit humain. 

À cet égard, cette étude de cas cherchera à mettre en évidence le fait que dans l’acte créatif humain, il y a une sensibilité dont les grands modèles de langage ne font pas (encore) preuve. De ce fait, l’humain reste indispensable dans le processus créatif, qu’il soit entrepris avec ou sans GML. Sans être un problème, ce qui découle de cette différence permet de mieux identifier de quelle manière l’IA pourrait être utilisée dans un domaine « artistique » sans remettre en question la créativité humaine. Bref, au terme de cette réflexion, la seule véritable préoccupation concernant le potentiel créatif de l’IA surgit lorsque les discours médiatiques occultent les distinctions essentielles entre la pensée humaine et la programmation algorithmique9.

Conversation avec ChatGPT : comment aborder la notion de « créativité »?

Rédige un très court poème qui fait preuve de créativité. 
ChatGPT : Dans l’éther des rêves, des étoiles en bavardage, 
Des pensées s’entrelacent, tissant un doux mirage.

Les ombres du silence, danseurs de l’obscurité, 
Chuchotent des mystères dans la nuit étoilée. 

Un murmure de l’inconnu, une symphonie sans fin, 
Le poème du cosmos, écrit dans l’encre du destin.
(OpenAI 2023)

D’un point de vue littéraire, il est possible de dire que ce poème, généré par l’IA, met en scène une animation de l’espace intersidéral à travers la personnification des étoiles et du vide. Par une imagerie abstraite, ces vers dévoilent un « poème du cosmos », c’est-à-dire une représentation de la manière dont les mouvements dans l’univers se narrativisent. D’un point de vue créatif, il est plus difficile de témoigner de son apport. En effet, il faut dire que la lecture de ce poème laisse avant tout une impression d’ambiguïté. Le thème, bien que curieux, ne s’inscrit pas dans un affect humain particulier. Les images disparates n’amènent ni à une forme de cohérence ni à une recherche herméneutique profonde d’un élément de notre réalité. Il en va de même pour sa structure poétique, formée de trois strophes de deux vers (ce qui est relativement commun), mais dont les rimes suivies (très commun) sont principalement pauvres. L’apport créatif de ce poème reste donc équivoque. Pourtant, ce GML, à la suite de notre demande, a généré une suite de mots suivant un calcul statistique, a exploré un thème en respectant le cadre poétique demandé, puis a ajouté des facteurs de diversité pour arriver au résultat « créatif » demandé10. Alors, de quelle manière ce poème témoigne-t-il d’une forme de créativité ?

Pour répondre à cette question, un point de départ intéressant serait de comprendre la manière dont nous évaluons la créativité d’un produit artistique. Or, pour y parvenir, il est nécessaire d’avoir une conception plus précise de cette notion. Si nous posons la question à ChatGPT, l’agent conversationnel définit la créativité comme « la capacité à imaginer, concevoir ou produire quelque chose de nouveau, original ou innovant » (OpenAI 2025). Bien que cette réponse semble contenir des éléments qui sont souvent associés à la créativité, il serait difficile d’étudier ce poème uniquement à partir de cette définition. D’ailleurs, celle-ci semble assimiler la créativité à l’introduction de quelque chose de nouveau dans un domaine. Cependant, une création artistique ne vise pas toujours à produire de la nouveauté ou à introduire une innovation tangible dans un domaine donné; elle peut aussi relever d’un geste expressif, introspectif ou dialogique, sans finalité productive au sens strict11

De ce fait, il faut élargir la définition de la créativité. Cette dernière doit être appréhendée par son caractère polysémique, multiforme et mouvant. Elle exprime parfois la capacité à résoudre des problèmes12, d’autres fois le procédé par lequel il est possible de produire une innovation transformatrice dans une société13, ou plus globalement une dimension de la psychologie humaine14. Par ailleurs, il est important de souligner qu’une démarche qui détermine ce qui est créatif paraît paradoxale. À vrai dire, fixer le cadre de la créativité signifie limiter sa portée, alors qu’une de ses composantes les plus importantes semble être sa capacité à surprendre, ou précisément à sortir d’un cadre prédestiné15

Face à la plurivocité de ce concept, il serait donc restrictif d’étudier le caractère créatif d’un GML à partir d’une seule définition. De plus, dans l’objectif de réfléchir au processus créatif de la machine vis-à-vis de l’humain, il est préférable d’explorer une variété de perspectives sur cette notion. Pour ce faire, l’enseignant-chercheur en psychologie cognitive Mark Runco propose de réfléchir à la créativité à travers quatre dimensions qui lui sont essentielles : l’utilité, la nouveauté, l’intentionnalité et l’authenticité16. À partir de ces quatre modalités intrinsèques à la créativité humaine, il sera possible de tracer les possibilités et les limites de la création générée par IA. 

L’utilité

Bien avant la création des GML, l’évaluation de l’utilité d’une production artistique était un des outils conceptuels utilisés pour appréhender le niveau de créativité d’un objet. 

Pendant longtemps, la créativité a été considérée comme une caractéristique purement humaine (Habib et al., 2024), qui est généralement définie comme une combinaison d’idées ayant une valeur, une utilisation ou une signification nouvelle pour diverses parties prenantes (Chirico et al., 2018; Guilford, 1950, 1967; Torrance, 1969, 1974; Habib et al., 2024).
(Farzaneh et al. 2024, 118)

Cette approche s’avère particulièrement pertinente dans le cadre de l’analyse de la créativité générée par ChatGPT, dans la mesure où elle semble être intégrée, de manière implicite, à son processus de production de contenu.

ChatGPT peut-il faire preuve de créativité ?           ChatGPT : Oui, dans une certaine mesure, je peux faire preuve de créativité en générant du contenu original basé sur les informations et les modèles de langage que j’ai appris pendant mon entraînement. Je suis capable de produire des textes, des poèmes, des idées et des concepts qui peuvent être considérés comme créatifs. […]
(OpenAI 2023)

Effectivement, cette réponse suggère que la créativité, dans le cas d’un GML, repose sur une reconnaissance externe. C’est le regard porté par un tiers qui confère à une production son caractère créatif17. Selon cette perspective, une création artistique n’est pas intrinsèquement créative; elle le devient dès lors qu’un groupe ou un individu lui accorde une certaine valeur. Par conséquent, il serait théoriquement possible de produire du contenu considéré comme créatif à l’aide d’un GML, à condition que la commande soit formulée de manière à répondre aux attentes ou critères valorisés par un public donné.

Cependant, cette conception pose plusieurs limites. D’abord, elle repose sur un jugement de valeur éminemment contextuel, insuffisant pour saisir la complexité de l’évolution des sensibilités culturelles. L’histoire de l’art regorge d’exemples d’œuvres ou d’artistes dont la créativité n’a été reconnue que de façon posthume, leur avant-gardisme n’ayant été pleinement apprécié qu’à la lumière de changements esthétiques ou sociaux ultérieurs. La redécouverte posthume de l’œuvre de Vincent Van Gogh en est un exemple particulièrement discuté. Ensuite, cette définition utilitariste de la créativité repose sur un terrain instable, en raison de l’absence de consensus sur les valeurs fondamentales qui devraient encadrer la création artistique, comme le défend Margaret A. Boden dans son livre The Creative Mind : « Because creativity by definition involves not only novelty but value, and because values are highly variable, it follows that many arguments about creativity are rooted in disagreements about value » (Boden 2004, 10). Ainsi, certains lecteurs pourraient percevoir dans un poème généré par ChatGPT un intérêt ou une originalité, tandis que d’autres y verraient une production sans profondeur ni signification. En définitive, cette approche de la créativité fondée uniquement sur la reconnaissance subjective d’une utilité ou d’une valeur risque de conduire à une nouvelle mésentente sémantique, tant les critères d’évaluation peuvent varier selon les époques, les milieux culturels et les sensibilités individuelles18

La nouveauté

Dans la définition de la créativité produite par ChatGPT, la nouveauté était un autre élément central pour cerner cette notion. Le caractère innovateur, nouveau ou original d’un produit artistique semble toujours être présent dans les discussions sur la créativité. 

L’œuvre [créative] se définit comme un objet dont le caractère innovant est reconnu immédiatement au moins par un groupe et plus tard par l’ensemble de la communauté au sein de laquelle a vécu l’artiste. L’œuvre peut être scientifique, artistique, sociale, technique ou artisanale.
(Cottraux 2010, 234-235)

Bien que la nouveauté dépende aussi d’une reconnaissance par un groupe de personnes, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une caractéristique à la fois moins contraignante, plus essentielle et davantage distinctive que la valeur accordée à une œuvre. Pour mieux appréhender la notion de nouveauté, il convient de la concevoir comme une transmutation du connu vers l’inconnu, où des éléments familiers sont réorganisés ou réinterprétés pour créer quelque chose d’inédit. Une idée est nouvelle, car elle transfigure ce qui existait auparavant, c’est-à-dire qu’elle est porteuse d’un modèle de pensée transformateur qui marque un précédent dans un contexte précis. La nouveauté, bien qu’elle émerge toujours de ce qui existe, bouleverse donc l’ordre établi.

Plusieurs artistes, penseurs et philosophes ont soutenu cette conception de la créativité. Par exemple, en 1863, Baudelaire formulait cette recherche artistique du nouveau autour de sa conception de la modernité, dans son célèbre recueil d’essais intitulé Le Peintre de la vie moderne : « La modernité, c’est le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable » (Baudelaire 2021 [1863], 17). Plus proche de nous, dans son livre On Creativity, David Bohm, philosophe des sciences, cherche aussi à expliquer ce phénomène par lequel la capacité à percevoir et à créer de la nouveauté détermine l’acte créatif.

« What is characteristic of the results of creative action, i.e. the scientific theory, the work of art, the building, […] and so forth? » Here, we must distinguish between an occasional act of penetrating insight and the discovery of something new that is really creative. In the latter, I suggest that there is a perception of a new basic order that is potentially significant in a broad and rich field. This new order leads eventually to the creation of a new structure […].
(Bohm 2023, 8)

De cette explication, il faut conserver l’idée que la découverte du nouveau est possible à partir d’une perception singulière des choses qui transcende le contexte d’origine d’un problème pour créer un nouvel ordre paradigmatique. Cette prémisse à la Créativité, avec un « C » majuscule19, se retrouverait donc dans tous les actes d’innovation allant de la théorie scientifique à l’œuvre d’art. 

Cependant, ces conceptions de la créativité demeurent cryptiques au moment de les mobiliser pour étudier une manifestation artistique. En effet, alors que la théorie de Baudelaire offre une réplique aux discours modernistes de son époque, celle Bohm s’intéresse surtout à comprendre l’origine des grandes découvertes scientifiques. Autrement dit, ces deux conceptualisations n’offrent pas un outillage analytique pour appréhender le degré de nouveauté d’une production artistique donnée. 

Donc, dans le but d’analyser le caractère nouveau du poème généré par ChatGPT, il est circonspect d’utiliser une conceptualisation de la nouveauté qui évoque ce même mouvement transformateur du connu vers l’inconnu, mais cette fois réfléchi spécifiquement pour le cadre de l’analyse littéraire. À ce propos, le théoricien de la littérature Victor Borissovitch Chklovski, dans son ouvrage Lart comme procédé, introduit le concept d’« étrangisation » pour expliquer ce phénomène de nouveauté dans l’art. L’étrangisation, terme parfois traduit par ostranénie, défamiliarisation ou distanciation, définit précisément la manière dont une image littéraire « créative » permet de concevoir un objet connu, mais à travers une nouvelle perception qui transforme la nature même de cet objet.

Le but de l’art est de délivrer une sensation de l’objet, comme vision et non pas comme identification de quelque chose de déjà connu; le procédé de l’art est le procédé « d’étrangisation » des objets, un procédé qui consiste à compliquer la forme, qui accroit la difficulté et la durée de la perception, car en art, le processus perceptif est une fin en soi et doit être prolongé; l’art est un moyen de revivre la réalisation de l’objet, ce qui a été réalisé n’importe pas en art.
(Chklovski 2018, 23-24)

Pour le dire autrement, une production artistique réussit, par ses procédés, à créer une nouvelle perception d’un objet, aussi simple soit l’objet, dans un processus de transfiguration, comme le résume bien Pierre Sauvanet dans son livre Éléments d’esthétique : « Bien plus qu’une imitation ou une figuration, l’art authentique serait donc une transfiguration du réel, jusqu’à créer un monde à part entière » (Sauvanet 2014, 79). Selon Chklovski, l’artiste posséderait une acuité d’esprit singulière qui lui permettrait de transcender le langage en ravivant la perception d’un objet figée par l’habitude : « Et voilà que pour rendre la sensation de la vie, pour ressentir les objets, pour faire de la pierre une pierre, il existe ce qu’on appelle l’art » (Chklovski 2018, 23). Ainsi, ce concept d’étrangisation se présente comme une manière plus précise de déterminer la présence de nouveauté dans une image littéraire. 

À partir de cette conception de la nouveauté dans la création littéraire, il devient donc possible de relire le poème « créatif » généré par ChatGPT, afin de considérer son potentiel de nouveauté. 

Dans l’éther des rêves, des étoiles en bavardage, 
Des pensées s’entrelacent, tissant un doux mirage. 

Les ombres du silence, danseurs de l’obscurité, Chuchotent des mystères dans la nuit étoilée. 

Un murmure de l’inconnu, une symphonie sans fin, Le poème du cosmos, écrit dans l’encre du destin.
(OpenAI 2023)

Dans ce poème, le programme algorithmique poétise le texte généré par une recherche d’images statistiquement inusitées dans le but stylistique et thématique d’animer les étoiles et l’espace intersidéral. Dans un sens, il est vrai que la juxtaposition de deux images a priori éloignées pour exprimer une idée, une situation ou une émotion tierce révèle la présence d’une certaine forme d’originalité dans la pensée poétique. Cependant, comme le souligne Chklovski, pour que ce procédé produise un réel effet d’étrangisation, l’objet décrit doit connaître une transfiguration. Seulement, le poème de ChatGPT n’amène à aucun moment le lecteur à réidentifier le cosmos d’une manière inédite. Bien au contraire, l’association de l’univers au mystique et la personnification des astres sont des lieux communs de la littérature. En somme, malgré des images tout au plus inhabituelles, ce poème échoue à outrepasser le cadre du connu. 

Par ailleurs, les quelques traces de nouveauté dans ce processus créatif algorithmique disparaissent une fois l’exercice répété. En effet, à moins d’une indication contraire de la part de l’utilisateur du GML, chaque nouvelle composition d’un poème original sera faite de la même manière, en suivant la même « formule »20

À partir de quels principes ChatGPT produit un poème « original » ?ChatGPT produit un poème original en s’appuyant sur plusieurs principes.           
1. Associations inédites → Il combine des idées et images surprenantes pour créer des métaphores originales.            
2. Structure et rythme → Il respecte ou réinvente des formes poétiques (sonnets, haïkus, vers libres).            
3. Jeu sonore → Il utilise allitérations, assonances et cadences pour donner une musicalité au texte.            
4. Figures de style → Métaphores, comparaisons et personnifications enrichissent le sens.            
5. Émotion et cohérence → Il adapte le ton et l’ambiance selon l’intention du poème.              
6. Innovation → Il revisite ou détourne les thèmes classiques pour surprendre le lecteur.
(OpenAI 2025)

Comme l’illustre la réponse de ChatGPT, la génération d’un poème dit « original » repose sur une série de principes stylistiques – associations d’idées, jeu sonore, figures de style, etc. – qui s’appliquent selon un schéma relativement stable. Cette approche procédurale révèle un fonctionnement formulique, où la variation est contenue dans des cadres préétablis.

Or, cette stabilité va à l’encontre du principe de l’étrangisation qui vise précisément à rompre avec les automatismes de perception et à renouveler notre rapport au langage et au monde. Là où la poésie humaine cherche à troubler, à déranger ou à déplacer les repères du langage et du sens, la poésie générée par une IA tend, au contraire, à reproduire ce qui est déjà connu, en s’appuyant sur des modèles statistiques issus d’un corpus existant. En ce sens, la pensée humaine, animée par une intention de transgression ou de décentrement par rapport aux normes, semble disposer d’une capacité bien plus féconde à engendrer une véritable rupture créative – une rupture qui ne se réduit pas à la variation, mais qui engage une redéfinition sensible et symbolique de l’expérience.

Si la créativité peut être décrite comme le fait d’imaginer quelque chose qui ne s’est jamais produit auparavant et de le réaliser, plus le résultat est improbable, plus il est original. Or, lorsque la situation l’exige, l’humain est capable de contourner les résultats les plus probables et de parier sur des chances de réussite plus faibles, si bien que, durant le processus de création, les humains ont une capacité supérieure à celle de l’IA de se détacher de la réalité et d’envisager des hypothèses (Brandt, 2023). (Farzaneh et al. 2024, 124)

À cet égard, l’originalité algorithmique reste, pour l’instant, prisonnière de ses propres limites structurelles.

L’intentionnalité

De ce qui précède, il faut aussi tirer la conclusion que ChatGPT ne possède pas toutes les capacités nécessaires pour produire du contenu créatif sans une présence humaine soutenue. En effet, il serait encore possible de modifier ce poème à l’aide de nouvelles indications dans le but de l’améliorer. Dans ce type de création, contrairement aux discours sensationnalistes mentionnés au début de l’article, l’auteur du poème demeure toujours un humain qui se sert de l’IA comme outil d’écriture. Toutefois, cette démarche n’est pas celle qui est questionnée dans cette étude, puisqu’elle ne porte pas sur les capacités « premières » des GML21. Autrement dit, le programme informatique de ChatGPT ne réussit pas à être intrinsèquement créatif, car il ne possède pas cette intentionnalité propre à l’acte créatif humain. 

Intentionality implies choice and intrinsic motivation, and for parsimony, it was one of the two characteristics that was proposed in the updated standard definition of creativity (Runco, 2023a). It characterizes human but not artificial creativity. (Runco 2023, 2)

Cette différence entre l’humain et la machine dans le processus créatif a au moins deux conséquences sur la production artistique. D’abord, l’humain ne procède pas de la même manière qu’un programme informatique. Face à la résolution d’un problème nécessitant une solution créative, l’humain doit faire preuve d’insight. C’est-à-dire qu’il doit être capable d’interpréter de manière intuitive et singulière une situation problématique en la percevant sous une nouvelle forme et en prévoyant les possibles conséquences de ce nouvel entendement. Jean Cottraux, auteur du livre À chacun sa créativité, voit dans l’insight une composante essentielle du processus créatif. 

L’insight est le moment de restructuration perceptive où se manifeste le pouvoir de changer la signification donnée d’un objet en une signification nouvelle et d’anticiper sur une nouvelle fonction possible. La création, qu’elle soit exceptionnelle ou quotidienne, dépend de la capacité de percevoir les transformations potentielles du réel.
(Cottraux 2010, 78-79)

De son côté, ChatGPT ne possède pas du tout cette capacité. Son mode de fonctionnement s’inscrit plutôt dans une logique de séquençage où les probabilités dictent les réponses et la formulation de ces réponses à partir d’une base de données. Noam Chomsky, dans son article « The False Promise of ChatGPT » publié dans The New York Times, souligne cette différence. 

The human mind is not, like ChatGPT and its ilk, a lumbering statistical engine for pattern matching, gorging on hundreds of terabytes of data and extrapolating the most likely conversational response or most probable answer to a scientific question. On the contrary, the human mind is a surprisingly efficient and even elegant system that operates with small amounts of information; it seeks not to infer brute correlations among data points but to create explanations.
(Chomsky & al. 2023, 2)

Ainsi, là où l’artiste explore les possibilités infinies de son imagination pour arriver à un résultat unique, l’IA est contrainte de respecter un ensemble de règles algorithmiques qui délimitent les frontières de sa programmation. Ces deux traitements de l’information sont non seulement opposés, mais ils aboutissent à un apport créatif distinct, car sans insight le potentiel innovant se cantonne à un territoire prédéterminé, comme le remarque Bohm : « This insight must be free of conditioning to previously existing patterns, otherwise it will, of course, ultimately be just an extension of mechanical reaction. Rather, it has to be fresh and new, creative and original » (Bohm 2023, 74).

Une deuxième conséquence importante de l’absence d’intentionnalité dans un programme algorithmique réside dans son incapacité à discerner les informations traitées. En effet, au moment de créer, l’humain est capable d’apprécier chaque création à partir d’un contexte. ChatGPT, pour sa part, crée dans un cadre prédéfini et à partir des demandes qu’il reçoit, sans différenciation, discrimination ou appréciation de ses productions. 

De cela découlent deux répercussions. Premièrement, le manque de discernement de l’IA l’exclut de la découverte par sérendipité22. En effet, l’humain, ne fonctionnant pas dans une optique linéaire, fait parfois des découvertes par hasard. Bien qu’une machine puisse avoir des défauts de conception qui lui permettent de sortir momentanément du cadre initial, il s’agit de situations accidentelles qui seront corrigées par la suite. De plus, si aucun humain ne remarque l’exceptionnalité de cette unique production générée par une IA, elle se perdra dans un flot indistinct d’informations. De ce fait, le discernement se situe « au cœur de la sérendipité : il ne suffit pas que l’anormal ou l’apparemment fortuit suscitent une hypothèse, il faut être en mesure de se rendre réceptif à l’inattendu pour lui donner suite » (Heuguet 2017, 161). Cet élément clé de la découverte créative semble une fois de plus échapper aux possibilités informatiques d’un GML tel que ChatGPT. Deuxièmement, la capacité à discriminer des informations ne relève pas uniquement d’un traitement logique ou analytique, mais implique aussi une dimension morale essentielle, notamment lorsqu’il s’agit de distinguer le bien du mal dans un contenu créé. Or, cette aptitude est étrangère au fonctionnement de ChatGPT. Bien que certaines restrictions soient intégrées à sa programmation pour l’empêcher d’aborder des sujets sensibles ou inappropriés, le modèle lui-même ne confère aucune valeur morale aux réponses qu’il génère. Lorsqu’il est interrogé sur un enjeu éthique, ChatGPT se limite à restituer les points de vue les plus courants, fondés sur les données disponibles, sans exercer de jugement critique ni manifester de position éthique propre. Cela souligne son incapacité fondamentale à engager un discernement moral, ce qui constitue une limite majeure dès lors qu’il est question de création porteuse de sens ou de responsabilité. À ce sujet, d’après Chomsky, il s’agirait d’une des caractéristiques les plus inquiétantes de l’IA.

ChatGPT exhibits something like the banality of evil: plagiarism and apathy and obviation. It summarizes the standard arguments in the literature by a kind of super-autocomplete, refuses to take a stand on anything, pleads not merely ignorance but lack of intelligence and ultimately offers a « just following orders » defense, shifting responsibility to its creators.
(Chomsky & al. 2023, 7)

En d’autres termes, le manque d’intentionnalité d’un GML ne constitue pas seulement un indice de son absence de créativité, mais révèle également une incapacité plus fondamentale, celle d’assumer une posture, un point de vue ou un engagement dans le geste créatif. Comme le souligne Chomsky, ChatGPT fonctionne par une forme de complétion automatisée, sans responsabilité ni conscience de ses propres énoncés. Cette posture algorithmique, qui se retranche derrière un simple « suivi des instructions », souligne l’écart essentiel entre la production générative et une véritable démarche artistique qui, elle, s’inscrit toujours dans une relation intentionnelle au monde, à l’œuvre et à autrui.

L’authenticité 

Finalement, l’authenticité constitue la dernière facette de la créativité humaine d’après l’étude de Runco. Une fois de plus, cette dimension fait nécessairement défaut à un GML, puisqu’un programme informatique ne possède ni individualité ni motivation intrinsèque. 

Authenticity is impossible for AI, but is also an important part of human creativity (Kharkhurin, 2014; Maslow, 1973; Rogers, 1959). […] It may be that AI can avoid filters, but there is no self to express, so no possibility of authenticity. The definition of authenticity offered by the Stanford Encyclopedia of Philosophy (2020a) is also very helpful. It defines « authentic » as « faithful to an original » and describes the authentic individual as « a person who acts in accordance with desires, motives, ideals or beliefs that are not only hers (as opposed to someone else’s) but that also express who she really is. » This captures some of the meaning of intrinsic motivation.
(Runco 2023, 2)

Une approche plus précise de l’authenticité en création littéraire pourrait s’appuyer sur le concept de style cognitif, qui traduit la manière dont l’individu « perçoit, mémorise et traite l’information de façon unique » (Cottraux 2010, 67). Ainsi, au moment de créer, toute l’expérience accumulée d’une personne s’inscrit dans l’œuvre comme une empreinte. C’est grâce à ce style qu’il est possible de reconnaitre un auteur après avoir lu quelques phrases dans une de ses œuvres, et c’est grâce à cela qu’il existe autant de styles d’écriture que d’écrivains. À l’inverse, une IA comme ChatGPT ne possède ni mémoire personnelle, ni subjectivité, ni intentionnalité. Ce qu’elle produit ne résulte pas d’un processus cognitif singulier, mais d’un calcul statistique visant à optimiser la probabilité des enchaînements de mots selon les données sur lesquelles elle a été entraînée. D’ailleurs, l’uniformité structurelle des productions du GML, qui pourrait donner l’illusion d’un style, relève davantage d’un gabarit génératif que d’une empreinte personnelle. Enfin, même si ces modèles peuvent être entraînés à reproduire les caractéristiques stylistiques d’un auteur donné, cela reste une simulation fondée sur la répétition de motifs observables, et non l’expression d’une intériorité créative. Bref, le style humain est l’expression vivante d’une subjectivité en mouvement, façonnée par l’expérience, la mémoire et l’intention, alors que ce que l’on pourrait percevoir comme un « style » dans une production générée par une IA n’est qu’un assemblage algorithmique, sans enracinement dans une histoire vécue et sans portée expressive véritable.

Par ailleurs, l’authenticité, dans le processus d’écriture, se manifeste également à travers la sensibilité de l’auteur. En effet, les émotions influencent directement ses choix stylistiques et narratifs, façonnant ainsi l’acte créatif. Contrairement à un programme informatique qui opère dans une réalité statique et dénuée d’affects, l’humain est continuellement traversé par des émotions qui modifient sa perception et son expression.

Exploitant l’ensemble de données dont elle dispose pour générer de nouveaux résultats, la créativité de l’IA n’est entravée, ni par l’anxiété, ni par le doute, ni par le plaisir. Il en résulte que « l’IA est intrinsèquement limitée à l’optimisation d’une précision moyenne sur un ensemble de données » (Esling et Devis, 2020, p.10). (Farzaneh et al. 2024, 125)

En définitive, l’authenticité est intrinsèquement liée à la sensibilité humaine, et elle constitue une source essentielle de sa créativité. C’est en puisant dans cette sensibilité que l’artiste parvient à insuffler une singularité à son œuvre.

Aussi la créativité exige-t-elle une motivation intrinsèque, une pleine conscience, un choix et une authenticité (Runco, 2023), la Stanford Encyclopedia of Philosophy (2020) définissant comme « authentique » ce qui est « fidèle à l’original ». L’individu authentique s’accepte lui-même, et de ce fait, ne se censure pas et ne filtre pas excessivement son expression. Il exprime donc ses idées et ses sentiments. (Farzaneh et al. 2024, 119)

La créativité artificielle

Tout au long de cette réflexion sur les diverses formes de la créativité propre à l’humain, la création assistée par une IA a parfois manifesté des aspects créatifs, tout en révélant, à d’autres moments, des lacunes dans certaines compétences fondamentales. Si ChatGPT peut générer un contenu de valeur empreint de traces innovatrices, il demeure dépourvu d’intentionnalité et d’authenticité dans son processus créatif. La distinction entre la créativité partielle de la machine et celle de la pensée humaine réside donc dans une différence fondamentale entre l’analyse du produit final généré par l’IA et l’étude du processus créatif humain.

It suggests that the process used by humans when they are creative is impossible for AI. This is very important because theories describing processes (or what Jay and Perkins [1997] called mechanisms) have much more explanatory power than theories that recognize only outcomes, output, and products.
(Runco 2023, 1)

Dans cette optique, l’intérêt suscité par les GML réside souvent dans leur rapidité et leur capacité à produire du contenu de qualité sur demande. Cependant, il est important de ne pas négliger la dimension humaine dans ce type de création :  « Also problematic is that claims of creative AI focus on output (“products” in the vernacular of the creativity research) rather than processes, and these products may fool some people into believing in creative AI. » (Runco 2023, 1) En effet, sans la conception du programme informatique, sans la formulation précise de l’utilisateur et sans tout le travail de perfectionnement par la suite, le produit final ne pourrait pas exister.

Il est dès lors essentiel de se montrer vigilant face aux stratégies de communication des entreprises technologiques, qui mettent principalement en avant les résultats obtenus par l’IA sans considérer le processus qui les sous-tend23. À défaut de cette mise en perspective, il est possible de penser qu’étant plus performante que l’humain dans l’accomplissement de certaines tâches, l’IA devrait élargir son domaine d’intervention, voire être autorisée à prendre des décisions à notre place.

Le véritable danger pour l’intelligence Humaine ne serait alors pas aujourd’hui une concurrence déloyale de l’intelligence Informatique, mais au contraire celui d’un abandon de notre esprit critique et de notre libre arbitre (Scaruffi 2016) : non seulement l’homme risque la bêtise en se déchargeant de plus en plus de nombreuses fonctions intellectuelles comme la mémoire, le calcul, la lecture… mais il risque surtout la connerie, l’absence d’esprit critique, en imitant l’intelligence numérique ou logique de l’IA. Car finalement, ne devrait-on pas inverser la question du fameux jeu de l’imitation de Turing et se poser cette question nouvelle : aujourd’hui, entre un humain et une machine, Qui imite Qui? (Marosan, 2019) Ne sommes-nous pas en train d’intérioriser, sous la pression d’une optimisation ressentie comme nécessaire, une bonne partie des processus de l’intelligence artificielle […]. (Fallery 2019, 9)

Cependant, puisque l’IA ne risque pas de disparaître, une perspective de solution pour éviter ces discours futuristes24 consiste à concevoir la production de contenu généré par l’IA comme une pratique singulière. Dans les milieux artistiques, notamment, la création assistée par l’IA pourrait développer un langage propre, non pas pour rivaliser avec les autres créations du même genre, mais pour explorer les possibilités uniques offertes par l’IA : « [The] ultimate goal of all those working on machine-generated art, literature, and music is to create work beyond any known human genre or human imagining » (Miller 2019, 264). Bref, de la même manière que la photographie n’a pas fait disparaître la peinture, l’IA pourrait cultiver sa propre forme de créativité sans remettre en question ni la créativité humaine ni nos capacités décisionnelles25. De cette manière, il existerait, d’une part, la créativité humaine telle que nous la connaissons, et, d’autre part, une créativité artificielle.

  1. 1Pour plus d’informations à ce sujet, consulter l’article de Frédéric Arnould, « Scénaristes et acteurs à la merci de l’intelligence artificielle », publié le 13 juin 2023 en ligne : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1987142/scenaristes-acteurs-greve-conflit-travail-hollywood-intelligence-artificielle.
  2. 2Je renvoie ici à « la thèse défendue par le philosophe français Jean-Michel Besnier, pour qui le transhumanisme ne serait jamais que l’expression ultime de cette honte prométhéenne – selon la formule employée par le philosophe Günther Anders dans son ouvrage L’obsolescence de l’homme – que ressentirait l’être humain devant la perfection de la machine » (Le Dévédec 2021, 21).
  3. 3« [L’IA est à] la recherche de moyens susceptibles de doter les systèmes informatiques de capacités intellectuelles comparables à celles des êtres humains. » (Devillers 2017, 115)
  4. 4L’agent conversationnel, questionné sur le futur, a répondu de cette manière : « The staff is divided by train of the burning machine building with sweat. No one will see your face. The children reach into the furnace, but the light is still slipping to the floor. The world is still embarrassed. The party is with your staff. My name is Benjamin. » (Miller 2019, 229)
  5. 5« J. McCarthy et M. Minsky utilisent en 1956 le néologisme ambigu d’Intelligence Artificielle lors d’un séminaire à l’université de Dartmouth (Prade 2016) […]. [Ils] comprennent rapidement que cette définition de leur champ de recherche peut attirer l’attention du public et faciliter leurs travaux sur la modélisation des fonctions cognitives […]. » (Fallery 2019, 2-3)
  6. 6À ce sujet, dans Le Mythe de la Singularité (2017), Jean-Gabriel Ganascia déconstruit l’idée largement répandue selon laquelle une intelligence artificielle pourrait, un jour, s’autonomiser de manière soudaine et incontrôlable.
  7. 7« The possibility of creative AI is often part of the discussion. That is in part due to the fact that the possibility of creativity gets right at central questions of AI being independent of human input. It is also relevant to the question of what kind of work AI can assume. Then there is the view that, if AI can be creative, various threats to humanity are possible (cf. Edwards, 2023). » (Runco 2023, 1)
  8. 8Pour en savoir plus sur le fonctionnement d’un GML, voir le lien suivant : https://enseigner.u-bordeaux.fr/application/files/4516/9987/5071/Kit_IAG_-_Fonctionnement_de_chat_GPT.pdf.
  9. 9« Businesses are strongly in favor of AI and will treat it as if it is creative even if it is not authentically so. Google’s chatbot Bard already states, “I’m Bard, your creative and helpful collaborator.” » (Runco 2023, 1)
  10. 10Pour en savoir plus sur ce processus, voir : https://chatgpt.com/share/67b125f4-296c-8003-85c8-ce139d3066e5
  11. 11Par ailleurs, certains artistes (notamment Jean Tinguely, Michael Landy et Banksy) présentent une démarche artistique « destructive », plutôt que productive.
  12. 12« Creativity is the production of new knowledge from already existing knowledge and is accomplished by problem solving. » (Miller 2019, 5)
  13. 13« La créativité peut se définir comme une action individuelle ou collective innovatrice, par laquelle un domaine de la culture est transformé. » (Cottraux 2010, 14)
  14. 14« [Creativity is] not a special ‘faculty’ but an aspect of human intelligence in general: in other words, it’s grounded in everyday abilities such as conceptual thinking, perception, memory, and reflective self-criticism. » (Boden 2004, 1)
  15. 15 « [Margaret Boden] goes on to provide three criteria by which we can assess to what extent an idea or an artifact can be considered creative: “A creative idea must be useful, illuminating or challenging in some way.” It’s not enough simply to be novel. To be truly creative, an idea needs to be genuinely original – a creative leap. It also needs to be unexpected and of genuine value. » (Miller 2019, 25)
  16. 16« That proposal identified two criteria and key dimensions of creativity (authenticity and intentionality) which should be added to those currently in the standard definition (i.e., originality and effectiveness). » (Runco 2023, 1)
  17. 17« An essential element in creative writing is that “the magic doesn’t come from the writer, it comes from the reader.” It seems truly magical when “a string of characters on a page sparks memory and emotion,” like a work of visual art or of music can. » (Miller 2019, 203)
  18. 18« Creative capacities are expressed in one way in childhood, but in a different way among mature and productive adults. They require certain things in the arts but different things in other fields (e.g., science, entrepreneurship, IT, mathematics). Creativity is viewed in different ways in different cultures as well (Kharkhurin, 2012; Tan, 2016). »
  19. 19« To start with, we need to distinguish between everyday creativity, like discovering a different route to work – little-c creativity – and the big domain-breaking feats of creativity, such as discovering the theory of relativity – big- C Creativity. » (Miller 2019, 6)
  20. 20 Voir un autre exemple de cette production de contenu par ChatGPT :  https://chatgpt.com/share/67aea8c8-5944-8003-a86b-0326450e4ffb
  21. 21« There is a huge difference between [art] created by machines under their own steam (end to end) and [art] created by computers which have been programmed to do so (ruled based). » (Miller 2019, 264)
  22. 22« Il ne faut pas oublier que le hasard est un grand pourvoyeur de résultats. C’est ce que les auteurs anglo-saxons appellent serendipity. Ce terme est dû à l’écrivain anglais Horace Walpole qui avait été impressionné en 1754 par un conte de fées racontant l’histoire des Trois Princes de Serendip (Serendip est l’ancien nom de Ceylan, actuel Sri Lanka). Dans ce conte, trois princes font des découvertes par hasard et ne trouvent que ce qu’ils ne cherchent pas. Horace Walpole utilisa ensuite le terme de serendipity pour décrire quelques-unes de ses découvertes accidentelles (Roberts, 1989). » (Cottraux 2010, 228)
  23. 23« En conclusion, rien dans l’état actuel des techniques d’intelligence artificielle n’autorise à affirmer que les ordinateurs seront bientôt en mesure de se perfectionner indéfiniment sans le concours des hommes, jusqu’à s’emballer, nous dépasser et acquérir leur autonomie. » (Ganascia 2017, 71)
  24. 24« Le futurisme est une manière de parler du futur au futur, sans jamais utiliser le conditionnel; une manière de prophétiser l’avenir sans jamais imaginer d’alternative possible. » (Mark Hunyadi 2018, 28, cité dans Le Dévédec 2021, 17-18)
  25. 25« D’un point de vue éthique, le plus important ne serait donc sans doute pas de se préoccuper d’Une super-IA potentiellement plus avancée que nous (même si c’est bien excitant), mais plutôt des défis que poseront la complémentarité des IA avec l’humain (même si c’est plus terre à terre). » (Fallery 2019, 10)