Avril 2004
L’Europe au cinéma
Texte de présentation
- Delphine Bénézet
- Vincent Bouchard
Pour souligner à nouveau l’interdisciplinarité de la revue, Vincent Bouchard et moi-même avions à cœur de solliciter pour ce quatrième numéro un ensemble de contributions qui interrogeraient spécifiquement le médium cinématographique. À mesure que nous discutions du projet et bien que nos recherches en matière de cinéma se recoupent assez peu, il apparut que plusieurs questions communes nous taraudaient. Nous avons donc décidé d’en faire le point de départ de ce numéro intitulé « L’Europe au cinéma ». Questions de production et de réception du cinéma européen.
Au moment où la notion même de cinéma national a été largement discutée par des théoriciens, à l’exemple de Benedict Anderson ou de Michèle Lagny, peut-on encore envisager chaque cinéma national de manière indépendante, ou alors existe-t-il une unité dans la production européenne ? Dans quelle mesure peut-on définir des dénominateurs communs à cette cinématographie ? Peut-on, par exemple, constituer un pôle esthétique homogène, en opposition avec le cinéma nord-américain ou d’autres formes de cinéma dans le monde ? D’un autre côté, vu le rayonnement du cinéma européen, il nous semblait important de se questionner sur les hybridations issues de métissages culturels ainsi que sur les facteurs économiques et culturels et les évolutions techniques qui façonnent et transforment le cinéma d’aujourd’hui.
Le pari que nous avons fait de solliciter diverses perspectives sur la question de l’Europe au cinéma fut admirablement tenu par les auteurs de ce numéro. Grâce au soutien renouvelé du Département de littérature comparée et de sa directrice, Amaryll Chanady, nous avons même pu recevoir à l’Université de Montréal un des chercheurs publiés dans ce numéro, le professeur Patrick Anthony Cavaliere. Le 30 avril 2004, dans une conférence intitulée « Mussolini and the Cult of Personality : Reconstructing Fascism Through Photographic Portraiture and Film », il est venu nous présenter une partie de ses recherches en cours. Cette conférence fut suivie d’un débat particulièrement fécond et animé, témoignant de l’intérêt des questions soulevées par le présent numéro.
Voici donc un court avant-goût des articles que nous avons assemblés. Comme il ne rend que très partiellement justice au travail des auteurs, je vous encourage vivement à vous plonger dans les textes !
Damien Rousselière ouvre ce numéro avec « Concentration de la diffusion du cinéma et diversité culturelle : quel rôle pour les réseaux indépendants ? ». Partant de la double nature du cinéma en tant qu’art et industrie, il analyse les stratégies et politiques qui influencent le contexte contemporain de production et de diffusion des films tout en établissant un diagnostic de la nouvelle place et du rôle potentiel des circuits de diffusions indépendants.
Patrick Anthony Cavaliere aborde quant à lui d’autre aspects de l’Europe au cinéma en se concentrant sur une cinématographie bien particulière dans « Contemporary Italian Cinema and Fascism : Memory, History, and Politics in the Films of Bernardo Bertolucci ». Il se penche en tant qu’historien sur un échantillon du cinéma de Bertolucci et sur la reconstruction qu’il nous propose de l’expérience du fascisme en Italie et de ses origines.
Deborah Walker s’intéresse aux relations entre les États-Unis et la France. Dans « From Honest Thief to Media Sociopath : American Culture through French Film Noir », elle se concentre plus particulièrement sur le film de Bertrand Tavernier L’appât pour interroger les notions de cinéma national, de contamination culturelle et de mondialisation.
Quant à Vincent Bouchard, il analyse la position singulière du cinéma canadien, influencé par deux vecteurs culturels majeurs. De par sa position entre cultures américaines et européennes, cette cinématographie affiche des marques particulières que l’auteur aborde au travers d’une étude de cas basée sur certaines productions de Jean Rouch et Michel Brault.
Enfin, l’article qui conclut ce numéro, « England and the Beasts : Ontologically Misreading the Other in Empire Cinema », se situe entre l’Afrique, l’Inde et la Grande-Bretagne. En effet, Leah Pate se penche sur un type de production cinématographique assez négligé mais pourtant fascinant, à savoir les films que l’Empire britannique produit dans les années trente et qui servent d’outils de propagande à l’idéal impérialiste.
Merci encore à tous ceux qui se sont investis dans la préparation de ce numéro et dans l’organisation de la conférence qui y fut associée. Remerciements particuliers à notre secrétaire de rédaction en 2003-2004, Marianne Villeneuve, ainsi qu’à Barbara Giusti (italien), Pavel Khol (tchèque) et Hernan Fernández (espagnol) pour leur aide ponctuelle à la traduction. Nous vous souhaitons une bonne lecture et un bon été !
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