Centre, périphérie et ethnocentrisme

La traduction française de Barney’s Version, de Mordecai Richler (2003)

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Les étapes successives traversées par la littérature comparée depuis les années 1960, des préoccupations élitistes relevant de la Weltliteratur à l’avènement des cultural studies, ont transformé la spécialité en champ d’études multidisciplinaire. Autrefois réservée à une élite polyglotte et souvent taxée d’européocentrisme (Chow ; Pratt), la littérature comparée se voit aujourd’hui de plus en plus confrontée à la problématique de la traduction des œuvres étudiées. Alors que des chercheurs comme Leyla Perrone-Moisés étudient la contre-attaque postcoloniale avant la lettre sous-tendue par l’approche anthropophage de la traduction inspirée par le poète brésilien Oswald de Andrade (Perrone-Moisés 181 sq.), des théoriciens plus radicaux de la traductologie se penchent sur le rôle directeur joué par la traduction sur la diffusion des œuvres, ou encore instruisent carrément le procès de la littérature comparée. À ce sujet, Susan Bassnett va même jusqu’à déclarer irréversible le déclin de cette discipline plus que jamais à la recherche de sa vocation :

Comparative literature as a discipline has had its day. Cross-cultural work in women’s studies, in post-colonial theory, in cultural studies has changed the face of literary studies generally. We should look upon translation studies as the principal discipline from now on, with comparative literature as a valued but subsidiary subject area.
(Bassnett 161)

Sans partager le point de vue de Bassnett sur l’avenir de la littérature comparée, nous la secondons tout à fait lorsqu’elle insiste sur l’importance capitale que la traductologie devrait occuper dans le champ d’études. Puisque nous devons souvent recourir à des traductions pour entrer en contact avec des œuvres littéraires ou cinématographiques (car nous ne maîtrisons jamais assez de langues), il nous semble important de réfléchir à la part de médiation impliquée par l’acte de traduire, lequel suppose le transfert du sens ou le respect de la lettre —rarement les deux. C’est pourquoi nous commencerons par confronter brièvement deux courants de la traductologie (cibliste et sourcier), représentés ici par Jean-René Ladmiral et Antoine Berman. Malgré l’intérêt manifeste d’une telle réflexion dans un cadre théorique général, nous croyons que l’examen d’un cas particulier produira des résultats plus fructueux. En effet, les vives réactions suscitées au Québec par la traduction francofrançaise du dernier roman de Mordecai Richler, Barneys Version, montrent combien la qualité d’une traduction (avec tous les paramètres que cela comporte) influence la réception de l’œuvre. À l’aide d’une analyse contrastive, nous espérons d’abord mettre en évidence les écueils d’une approche ethnocentrique de la traduction littéraire, ici pratiquée sans les compétences culturelles adéquates, pour enfin intégrer la Francophonie à la problématique de l’assimilation de l’Autre.

Ladmiral et Berman : ciblistes, sourciers et ethnocentrisme

Dans un article intitulé « Sur la philosophie de la culture impensée de la traduction », Jean-René Ladmiral rappelle les positions défendues par ces deux approches. En résumé, le traducteur cibliste crée des « verres transparents » en pratiquant « l’équivalence dynamique », tandis que le sourcier produit des « verres colorés » grâce à « l’équivalence formelle » (Ladmiral 1999 : 142- 143)2. Le premier masque donc l’opération induite par la traduction en livrant un texte lisse, alors que le second laisse des traces de la langue d’origine dans la langue-cible. On connaît la position de Ladmiral dans la « polémique » qui oppose ciblistes et sourciers. Traducteur de Habermas et d’Adorno, il est aussi un cibliste convaincu et un critique de Walter Benjamin (Ladmiral 1981). Il s’étonne d’ailleurs des passions soulevées par le débat, surtout en ce qui concerne les implications politiques de l’acte de traduire. Aussi rejette-t-il en bloc les accusations « d’impérialisme culturel » (Ladmiral 1999 : 145) lancées par Henri Meschonnic contre les ciblistes (notamment au sujet de l’européocentrisme, du logocentrisme et du colonialisme), de même que tous les sous-entendus idéologiques qui s’y rattachent. Ladmiral considère ces attaques comme autant de déplacements vains de la politique dans le champ de l’esthétique et, bien que les critiques soient en partie fondées, il note qu’elles fuient néanmoins le véritable débat, soit la part inconsciente de l’acte de traduire. Ainsi, selon lui, des sourciers comme Benjamin et Berman souffriraient du culte judéo-chrétien pour la lettre. Sans le vouloir, ils traduiraient toujours une œuvre comme s’il s’agissait d’un texte sacré : au même titre que la Bible, l’œuvre de départ est originaire. Cet a priori implique non seulement une hiérarchie entre les langues (et entre les lecteurs), mais aussi une perte de lisibilité redevable aux calques et aux « paléologismes » (soit du grec ancien ou du latin). Selon Ladmiral, le texte littéraire porte un sens à transmettre, sinon il ne serait qu’une forme vide : contrairement à ce que semblent soutenir Benjamin et Berman, le sens ne serait donc pas inessentiel.

S’inscrivant quant à lui dans la longue tradition herméneutique, Antoine Berman considère l’acte de traduire comme une interprétation de la lettre et récuse d’emblée les accusations de littéralisme qui sont souvent lancées contre les sourciers, notamment par Ladmiral, autrement dit le motàmot. Pour asseoir sa réflexion, il va même jusqu’à poser cet axiome de départ : « la traduction est traduction-de-la-lettre, du texte en tant qu’il est lettre. Que cela soit l’essence ultime et définitive de la traduction, s’éclairera peu à peu » (Berman 25). Évidemment, si nous considérons la majorité des traductions qui se publient aujourd’hui, fussent-elles techniques ou littéraires, cette position semble radicale ou alors terriblement rétrograde. Or, Berman soutient son affirmation en critiquant les trois principes canoniques de la traduction occidentale, selon lui profondément cibliste : « Culturellement parlant, elle est ethnocentrique. Littérairement parlant, elle est hypertextuelle. Et philosophiquement parlant, elle est platonicienne » (26). Puisque ces principes masquent la véritable essence de la traduction (qui doit être éthique, poétique et pensante), on doit les détruire.

Dans l’analytique de la traduction qu’il propose, Berman s’occupe surtout des deux premiers aspects, soit l’ethnocentrisme et l’hypertextualité (le platonicisme étant trop vaste pour la portée de son essai). Selon lui, une écrasante majorité des traducteurs se plient à ces deux principes implicites, « formes normales et normatives de la traduction » :

Ethnocentrique signifiera ici : qui ramène tout à sa propre culture, à ses normes et valeurs, et considère ce qui est situé en dehors de celle-ci — l’Étranger — comme négatif ou tout juste bon à être annexé, adapté, pour accroître la richesse de cette culture.

Hypertextuel renvoie à tout texte s’engendrant par imitation, parodie, pastiche, adaptation, plagiat, ou toute autre espèce de transformation formelle, à partir d’un autre texte déjà existant.
(29)

Bien entendu, ces deux concepts s’interpénètrent et sont intimement liés aux célèbres belles infidèles, surtout en vogue aux XVIIe et XVIIIe siècles. Ils impliquent des transformations de toutes sortes selon les goûts, les bienséances et la morale d’une époque donnée. D’après ces paramètres, on corrige, supprime, embellit, adapte, etc. En fait, selon Berman, cette attitude d’assimilation de l’Étranger, ce qu’il appelle aussi l’annexion du sens, nie la diversité de Babel en supposant l’unité des langues. Dans cette optique, plutôt critiquable il va sans dire, ce qui se dit dans une langue doit inévitablement trouver son équivalent dans l’autre.

Toujours dans l’esprit de la traduction cibliste, donc ethnocentrique, Berman énonce deux axiomes familiers : « on doit traduire l’œuvre étrangère de façon à ce que l’on ne “sente” pas la traduction, on doit la traduire de façon à donner l’impression que c’est ce que l’auteur aurait écrit s’il avait écrit dans la langue traduisante » (35). La subordination à ces deux axiomes est évidemment lourde de conséquences, car elle dicte une certaine forme d’homogénéisation stylistique. Si la traduction doit se faire oublier, elle sera donc écrite dans une langue normative, elle ne devra pas heurter le lecteur par des étrangetés lexicales ou idiomatiques, elle veillera même à masquer les écarts normatifs présents dans l’original (c’est-à-dire le corriger) et chercher des équivalents plus courants. Cette tendance à l’harmonisation normative a pour corollaire l’emploi massif de procédés littéraires hypertextuels, phénomène que Berman appelle la « littéralisation » ou la « sur-littérature ». Bref, « une œuvre qui, en français, ne sent pas la traduction, c’est une œuvre écrite en “bon français”, c’est-à-dire en français classique. Voilà un point précis où la traduction ethnocentrique devient “hypertextuelle” » (35). En fait, si Berman remet en question ces deux axiomes canoniques, c’est pour mieux souligner le fait qu’ethnocentrisme et hypertextualité sont inhérents à toute traduction qui s’occupe du transfert du sens (de l’inessentiel, selon Benjamin), plutôt que de se soucier de préserver la lettre dans tout ce qu’elle connote (c’est-à-dire dans son iconicité). Pour lui, sens et lettre sont inextricablement liés : dès que la lettre disparaît, la perte de sens au moment du transfert dans la langue traduisante correspond à la part des anges.

La traduction française de Barneys Version : un cas ambigu

On ne peut aborder l’œuvre romanesque de Mordecai Richler (et a fortiori la problématique de sa traduction en français) sans tenir compte du contexte sociolinguistique montréalais et québécois. En effet, constamment problématisé par Richler, le bilinguisme relatif de Montréal constitue un thème profondément inscrit dans la trame fictionnelle de ses romans. Cela se remarque particulièrement dans Barneys Version (BV)Le Monde de Barney (MB)—, où la nostalgie de Barney pour une époque révolue se mêle au fiel proverbial de l’auteur contre les idéologues de tout crin. Les difficultés posées par la traduction de Richler en français diffèrent sensiblement de celles inhérentes à la traduction d’autres auteurs issus d’un contexte bilingue. Par exemple, bien que décrit en allemand, l’univers pragois de Kafka se transpose en tchèque sans trop de difficultés (cette réalité existe avant tout en tchèque), tout comme la Belgique d’un Hugo Claus en français, à condition que la compétence des traducteurs dépasse la seule maîtrise des langues en présence. Car pour bien traduire un texte littéraire, il faut en saisir les « réseaux signifiants sous-jacents » (Berman 61-62). Bien entendu, étant donné les langues nécessaires à l’opération, des auteurs comme Kafka et Claus courent de fortes chances d’être traduits respectivement par un Tchèque et un Belge, ce qui minimise les risques d’incompréhension. Or, dans le cas qui nous intéresse, les assises culturelles semblent faire cruellement défaut à Bernard Cohen3 qui, comme le souligne Réginald Martel, « manifestement, n’a jamais mis les pieds ici [au Québec] » (Martel). Il n’est d’ailleurs pas le seul à l’avoir remarqué (cf. Houde ; Fortin).

Les nombreuses déformations présentes dans la traduction française du Monde de Barney concernent un lectorat bien particulier. En effet, d’après les grandes lignes que nous venons d’esquisser à partir des réflexions de Ladmiral et Berman, la traduction de Cohen affiche plusieurs traits ciblistes, tout en conservant des traces de l’original (street, cottage, etc.), afin d’en accentuer les origines nord-américaines ou anglo-saxonnes4. Cependant, les plus graves lacunes du travail de Cohen surgissent au moment de déterminer le narrataire qui sous-tend sa traduction. Car à qui s’adresse-t-elle, au juste ? Aussi absurde que cela puisse paraître, nous croyons que Cohen a exclu les Québécois, pourtant voisins immédiats de l’auteur, de son horizon de récepteurs (Berman 69-78). L’aller-retour entre Montréal et Paris a défiguré la réalité du roman à un point tel qu’un Montréalais s’y sent « en étrange pays dans [son] pays lui-même » (Louis Aragon, cité dans Miron 81). Marie-Claude Fortin écrit à ce sujet : « Prenez le cas de Mordecai Richler, cet auteur aussi montréalais que vous et moi, qui voit sa prose traduite à Paris avant de revenir sur les tablettes de nos librairies dans des collections dites de Littérature Étrangère, entachée d’erreurs de traduction parfois grossières » (Fortin). Bref, pour paraphraser Berman, Cohen a non seulement biffé la lettre de l’original, il a aussi ignoré la lettre parallèle du contexte québécois, parvenant à rendre obscures tant les expressions que les réalités quotidiennes.

Réalités québécoises et institutions canadiennes : un malaise constant

Si nous devons adresser des reproches particuliers à Cohen, ceux-ci concernent surtout son approche ethnocentrique du roman de Richler, fût-elle consciente ou non. Visiblement, les connaissances de Cohen sur la culture et les institutions du Québec et du Canada se limitent à la base et son point de vue demeure très parisien. Il n’est pas nécessaire de creuser bien loin pour repérer les dérapages, car les aberrations sautent immédiatement aux yeux : au fil des pages, les incohérences s’ajoutent aux contresens, les emplois non idiomatiques aux non-sens.

D’abord, Cohen éprouve beaucoup de difficulté à nommer le pays et ses habitants, c’est-à-dire à trouver les mots justes pour les désigner. Par exemple, il propose de traduire « French Canadian » (dans sa forme nominale ou adjectivale) de plusieurs façons, sans jamais y parvenir totalement : il emploie en vrac « franco-canadienne » (MB 112), « Français-Canadien » (MB 150), « français-canadien » (MB 248), « canadiens français » (MB 530) et « Canadiens-Français » (MB 79, 531). Il commet d’autres bourdes de débutant lorsqu’il touche à l’histoire et la géographie canadiennes, d’abord en traduisant « Lower Canada » (BV 92) par « Canada inférieur » (MB 139)5, puis en se lançant avec maladresse dans la glose. En effet, aux notes 15 et 17, nous apprenons coup sur coup que Gaspé est une « [p]éninsule boisée de l’est du Québec » (il s’agit plutôt d’une ville) et que Louis Riel était un rebelle métis de la « Red River » ! En fait, avec un peu de bonne volonté, le traducteur aurait facilement pu trouver les termes idiomatiques, appropriés ou, à tout le moins, correctement orthographiés. Après une recherche minimale, nous avons trouvé Canadien français, canadienfrançais et BasCanada, de même que Rivière Rouge, respectivement dans les articles « Canada » et « Red River » (sic) du Petit Robert des noms propres (1994). Quant à la Gaspésie, traduction juste de l’anglais « the Gaspé » (BV 49), il suffisait de jeter un coup d’œil sur l’article inséré après « Gaspé » dans le même ouvrage6.

Pour accablantes qu’elles soient, ces erreurs de dénomination se voient déclassées dès que l’action du roman se déroule à Montréal, décor principal du Monde de Barney. Dans le compte rendu cité plus tôt, Réginald Martel faisait remarquer « l’absence de rues à Montréal : il n’y a que des streets » (Martel). Ce phénomène s’explique sans doute par la volonté de Cohen de préserver l’accent anglais de Richler dans sa traduction (a priori, cette décision aurait souri à Berman), mais son ignorance du tissu urbain montréalais donne lieu à quelques inventions cocasses. Ainsi, le boulevard Saint-Laurent (« the Main ») devient tantôt « Main Street » (MB 77), tantôt plus justement « la Main » (MB 479, 530), la rue Saint-Urbain se transforme en « Urban Street » (MB 103), le boulevard de Maisonneuve devient une « avenue » (MB 567), l’avenue Monkland une ville7, le boulevard Décarie perd son accent aigu (MB 162) et, pour couronner le tout, Cohen rebaptise l’Autoroute des Laurentides à sa façon : son « Autoroute à six voies du Saint-Laurent » (MB 160) tente vainement de traduire « six-lane Laurentian Autoroute » (BV 107)8. Étrangement, au lieu de rendre un Montréal anglophone lisible à l’ensemble du public de langue française, la traduction de Cohen ne fait qu’embrouiller ceux qui connaissent déjà bien la ville…

Les approximations du traducteur ne se limitent pas qu’aux rues de Montréal, ni à la simple dénomination des lieux. En fait, nous devons également nous incliner devant la créativité de Cohen lorsque vient le temps de nommer en français les institutions culturelles et administratives du Québec et du Canada. Sa constante négation de la lettre parallèle du contexte québécois fait de son entreprise une réinvention de la roue. Étant donné que Barney tire souvent à boulet rouge sur ces institutions, non sans leur soutirer de l’argent, ces ratés ne passent pas inaperçus. De plus, la récurrence de ce type d’erreur contribue à attiser l’exaspération du lecteur avisé. Ainsi, « the Montreal General Hospital » (BV 11) et, plus loin, « the Jewish General Hospital » (BV 192) deviennent respectivement « l’hôpital Central de Montréal » (MB 23) et « l’hôpital juif de la ville » (MB 280)9 ; « the Hudson’s Bay store » (BV 125), quant à lui, gagne en pittoresque et s’appelle le « magasin général de la Hudson Company » (MB 184)10 ; enfin, le « Quebec City’s Winter Palace » (BV 67), véritable image d’Épinal du carnaval d’hiver de Québec, se transforme en un anonyme « Palais d’Hiver local » (MB 102)11. L’agacement causé par ces imprécisions répétées s’élève d’un cran dès que Cohen s’essaie à traduire librement le titre de certaines institutions canadiennes. Les résultats qu’il obtient mettent en péril la lisibilité même de sa traduction. Par exemple, ce que les Québécois connaissent sous le nom d’Office National du Film (ONF) est rebaptisé « Conseil national du cinéma » (MB 134) et la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) retrouve le nom plutôt folklorique qu’elle porte en France aujourd’hui encore, soit la « Police montée » (MB 134 ; aussi l’abréviation PM [!] : 184). Quant au Conseil des Arts du Canada, il reçoit deux noms différents, ce qui n’ajoute rien à la clarté : « Conseil culturel canadien » (MB 146) et « Conseil culturel du Canada » (MB 546). Puisque la terminologie fédérale s’est fixée depuis la bilinguisation officielle du pays12, acquérant par le fait même une valeur normative (d’où notre emploi de l’expression bermanienne de lettre parallèle, unique aux contextes officiellement bilingues ou multilingues), les efforts de Cohen s’avèrent purement contre-productifs. En traduisant des termes normalisés sans prendre en considération la valeur idiomatique qu’ils recèlent pour une part importante des locuteurs de la langue traduisante, Cohen biffe l’altérité québécoise sans même rendre les institutions canadiennes plus compréhensibles aux francophones européens. Coller à la terminologie officielle, à la lettre parallèle, n’aurait pas exigé davantage d’efforts.

Or, la volonté affichée par Cohen de traduire Richler en faisant fi de la lettre parallèle n’engendre pas, toutes proportions gardées, que des maladresses mineures. Au contraire, la tendance assimilatrice de Cohen l’entraîne parfois dans les non-sens, lesquels ne sont malheureusement perceptibles que par le lectorat francophone du Canada. Par exemple, là où Richler emploie « dépanneur » (BV 86), terme profondément enraciné tant en français qu’en anglais du Québec13, Cohen commet une faute de surtraduction —du français au français ! En effet, la « boîte de dépannage » (MB 129) qu’il propose ne transmet ni le sens, ni la lettre du mot : dans le contexte québécois, il s’agit même d’un non-sens. Dans la même veine d’interprétation nébuleuse, Cohen va même jusqu’à fonder un nouveau parti politique, en traduisant « [t]he Tory party’s Québécois godfather » (BV 106) par l’étonnant « parrain du parti conservateur québécois » (MB 159)14 ! Il va sans dire que la récurrence de ce type d’invention mine lourdement la crédibilité du traducteur aux yeux d’un lectorat qui maîtrise effectivement le code qu’on tente de maquiller. Malgré tout, ces glissements ne constituent pas les déformations ciblistes les plus frappantes, ni même les plus dénuées de sens. Selon nous, c’est dans les allusions aux sports préférés de Barney, soit le hockey et le base-ball, que l’assimilation et le déni de l’Autre deviennent les plus perceptibles. Nous pourrions même affirmer que la traduction ethnocentrique de ces références en français métropolitain, par le fait même rendues étrangères au seul lectorat francophone susceptible de les comprendre, jette le discrédit sur l’ensemble du travail de Cohen.

En effet, il y aurait fort à parier que le traducteur, comme la grande majorité des francophones européens, ne sait pas grand chose des règles du hockey et du base-ball, ni de leur organisation en ligues professionnelles. Alors, il ne faut pas s’étonner si Cohen n’en connaît pas même les anecdotes les plus répandues dans la culture populaire nord-américaine. D’ailleurs, la manière dont il en parle, bien que plus homogène que nombre de traductions françaises portant sur les mêmes sujets, trahit un manque flagrant d’expérience pratique : tout au plus aura-t-il assisté à quelques parties, sans trop en comprendre le déroulement. Encore une fois, Cohen ignore tout des idiomatismes employés au Québec pour décrire en français ces deux réalités nord-américaines. À la décharge de Cohen, précisons qu’il n’est pas le seul. Nous n’avons jamais lu la moindre traduction française d’une anecdote sportive nord-américaine qui fût compréhensible. À propos des termes de base-ball, Marie-Claude Fortin rapporte l’anecdote suivante :

Dans Il pleut des rats, le deuxième roman de David Homel, paru chez Leméac Actes Sud, la description d’une partie de base-ball, bourrée d’anglicismes, devient parfaitement illisible pour un Nord-Américain fervent de ce sport. « Quand on a travaillé sur ce passage de la traduction, rappelle Homel, j’ai envoyé à Christine LeBoeuf, la traductrice, une liste de tous les termes français utilisés ici au base-ball. Mais ça n’a pas passé. On a décidé, là-bas, d’utiliser les équivalents français. On était convaincu que de toute façon personne ne comprendrait ».
(Fortin)

Alors, au lieu de s’épargner du travail en ayant recours à la lettre parallèle, Cohen adapte plutôt les termes de hockey, s’inspirant parfois du football et se ménageant toujours des libertés considérables :

En plus des habituels entêtements propres aux traducteurs français de romans nord-américains (barrière pour bande [boards], palet pour rondelle [puck], etc.), qui rendent souvent ces passages opaques et insupportables pour le lectorat québécois, Cohen trahit la superficialité de ses connaissances sportives en accumulant maladresses, contresens et non-sens. Il écrira par exemple que « [c]et abruti de Savard n’aurait jamais dû remplacer Chelios » (MB 182), alors que n’importe quel amateur de hockey du Québec se rappelle qu’il s’agissait plutôt d’un échange15, ou alors il dira que « [l]es “Canadiens” obtiennent un penalty » (MB 515), ce qui constitue un contresens. En écrivant « the Canadiens take a penalty » (BV 356), Richler disait exactement l’inverse, c’est-à-dire que les Canadiens écopent d’une pénalité. Plus loin, sans s’apercevoir davantage de l’effet comique créé par le choix des mots, Cohen fait dire candidement à un journaliste de la Gazette que « Phil Goyette s’est fait crosser [sic] par Stan Mikita » (MB 380). Puisqu’en France le hockey se pratique avec une crosse, il s’agit sans doute d’une traduction cohérente de « cross-checked » (BV 262) ; mais compte tenu des extensions sémantiques du verbe crosser (ou se crosser) en français québécois, il s’avère difficile de l’accepter sans sourire16.

Cela dit, nous croyons que la plus grave incompréhension de Cohen concerne une anecdote de base-ball (le savait-il seulement ?), soit la première embauche, en 1945, d’un joueur noir américain par une équipe professionnelle blanche, les Royaux de Montréal, alors filiale des Dodgers de Brooklyn. Faisant confiance à l’encyclopédie de son narrataire, le soustexte mentionné par Berman (61-62), Richler comprime l’événement dans cette formule laconique : « Jackie Robinson breaking in with the Montreal Royals » (BV 230). Ainsi est-il parvenu à dérouter complètement son traducteur parisien, qui n’a visiblement jamais entendu parler de ce Robinson. C’est pourquoi, pour l’occasion, Cohen se lance dans une paraphrase aux effets catastrophiques sur le sens : « Jackie Robinson forçant la défense des Royals [sic] de Montréal » (MB 333). Dans ce court passage, le traducteur se tire dans les deux pieds : Robinson s’est taillé une place au sein des Royaux (il ne peut donc jouer contre eux) et le principe d’alternance des manches offensives et défensives au base-ball fait en sorte qu’il est absolument impossible de forcer la défense adverse (comme c’est le cas au hockey ou au football).

Exotisation des réseaux langagiers vernaculaires : faux argot et faux joual

Dans La Traduction et la lettre ou lauberge du lointain, Berman souligne les visées polylinguistiques inhérentes à la prose et décrit l’effacement de la langue populaire par la traduction cibliste. En faisant cohabiter l’anglais littéraire et le slang dans les mémoires posthumes de Barney, Richler exploite tous les registres de langue offerts par la prose. Idéalement, d’après les observations de Berman (63-64), Cohen aurait dû tenter de rendre cette polyphonie. Jusqu’ici, nous avons souligné les déformations et les absurdités présentes dans sa traduction, mais il nous est impossible d’affirmer que sa négation de l’Autre québécois du Monde de Barney soit totale. Certes, le recours quasi systématique au faux argot pour rendre l’anglais populaire de Barney et de son père, Izzy Panofsky, transpose l’action dans une espèce de Belleville imaginaire, mais cela n’empêche pas Cohen d’insérer çà et là quelques éléments de faux joual. Bien entendu, il opte pour la première solution dans la majorité des cas, parfois même sans justifications solides17. Pourtant, ses tentatives d’imitation de certains traits oraux, ainsi que ses emprunts au lexique du français québécois, surtout au début du roman, sont rares mais bien réels. Par exemple, à plusieurs reprises il mettra sous la plume de Barney le d’insistance (« Je me perds en digressions, là » : MB 15), de même que l’expression surannée « moi itou » (MB 43), deux traits oraux beaucoup plus courants au Québec qu’en France. À Barney, il fera aussi dire « niaiseux » (MB 14), version québécoise de niais, mais cela constitue l’exception : très versé dans l’argot parisien, Barney évite cette langue qu’il considère comme un patois.

En fait, le personnage qui révèle les inclinations les plus marquées pour le faux joual est l’inspecteur Izzy Panofsky qui, dans Barneys Version, parle un anglais approximatif et mâtiné de yiddish. Les quelques expressions québécoises qu’il connaît se trouvent toutes concentrées dans une longue tirade placée, elle aussi, au début du roman. À cette occasion, il emploie « baveux » (insolent), « ils me pognaient » (ils m’épinglaient), « écœurant » (salaud), « comment ça se fait que » et il s’emporte : « Jésus, faut-y être con ! ils m’ont dit : Tu nous ramènes plus jamais un de ces types ici, ou t’es crissé dehors » (foutu à la porte) (MB 78-79). Outre l’emploi non idiomatique de Jésus, ce passage joualisant pose un véritable problème, car il fait figure d’hapax dans le roman. En effet, il s’agit du seul moment où le père de Barney a recours au français québécois. Partout ailleurs, après l’exotisme plaqué des cent premières pages, le traducteur gomme ces marques et Izzy s’exprime dans un faux argot plus ou moins approprié, où se succèdent les « gisquettes », « mouflets », « rien à croûter » et « que dalle » (MB 289-290). Cohen va même jusqu’à biffer le jargon franglais —quelque peu artificiel, il est vrai— d’un chauffeur de taxi. Alors que Richler lui fait dire « Mon blood pressure est sky-high […]. C’est le stress » (BV 216), Cohen élimine l’étrangeté (ou le mépris) de la réplique en mimant un français campagnard (?) : « J’me suis tout artourné les dedans […]. Le stress, quoi ! » (MB 313). Ici, bien qu’il y ait d’abord lieu d’interroger l’authenticité de l’expression originale, nous pourrions également nous demander pourquoi Cohen, ailleurs si prompt à préserver les accents anglais, remplace le faux joual de Richler par le sien.

Traduire pour la Francophonie, mission impossible ?

Dès qu’il s’agit d’aborder le concept de la construction identitaire, les théories postcoloniales font surface pour examiner le phénomène en profondeur. Dans le cadre de la Francophonie, ces questions se posent tout naturellement pour les anciennes colonies africaines administrées par la France et la Belgique, mais plus rarement dans le cas du Canada et du Québec. Pourtant, la structure de fonctionnement qui se profile encore aujourd’hui derrière le monde de l’édition littéraire francophone rappelle, toutes proportions gardées, l’Âge d’or de l’Empire colonial français. Ainsi persiste, malgré les indépendances, la dichotomie séculaire entre la périphérie et le centre. D’ailleurs, le trajet parcouru par Barneys Version reproduit sensiblement la relation commerciale qui unissait jadis la Nouvelle-France à sa Mère Patrie : importation de matières premières, transformation à la mode française, réexpédition vers la colonie de produits plus ou moins adaptés au contexte. Marie José Thériault, double lauréate du Prix du Gouverneur général de la meilleure traduction (Lœuvre du Gallois de Robert Walshe, 1993, Boréal/Calmann-Lévy ; Arracher les montagnes de Neil Bissoondath, 1997, Boréal), résume la situation en ces termes : « Le fond du problème, c’est le paternalisme des Français, leur méconnaissance de l’autre, leur manque de disponibilité à la culture de l’autre, et la “dirigite” aiguë, chronique, dont ils semblent souffrir » (Fortin).

Certes, traduire pour la Francophonie n’est pas une mince tâche, car il ne suffit pas de déterminer la cible à viser, encore faut-il l’atteindre. Or, nous l’avons montré avec le travail de Bernard Cohen, les traducteurs métropolitains négligent souvent une large part du lectorat potentiel et restreignent (inconsciemment ?) leur horizon de récepteurs à l’Europe francophone (un marché fort important), cela même lorsqu’il s’agit de romans canadiens ou américains. En conséquence, nous croyons qu’un léger décentrement de l’activité de traduction, c’est-à-dire un déplacement de Paris vers le Québec et l’Afrique, pourrait avoir un impact bénéfique sur la lisibilité de certaines œuvres en français, du moins pour un lectorat extra-européen. Malheureusement, comme le dit Lori Saint-Martin, « [c]’est un rapport de force, que voulez-vous, ils sont plus nombreux, ils sont convaincus d’avoir la bonne réponse » (Fortin). Évidemment, nous devons admettre que les auteurs anglo-montréalais constituent un cas à part, en raison de la réalité bilingue qu’ils décrivent et de la lettre parallèle que cela induit. C’est pourquoi il nous semble qu’un traducteur québécois, en raison de sa connaissance concrète du terrain, serait plus à même qu’un traducteur français (eût-il les meilleures intentions du monde) de décoder le soustexte d’un roman canadien ou américain. Cela ne revient pas forcément à « prétendre qu’une traduction faite au Québec est nécessairement supérieure, ni qu’aucun traducteur français n’est compétent (“Il y en a d’excellents, rappelle Lori Saint-Martin, je pense entre autres au traducteur de Russel Banks”), mais tous les traducteurs interrogés s’entendent sur une chose : il est évident qu’à compétences égales, l’œuvre d’un auteur nord-américain a toutes les chances d’être mieux servie par un traducteur qui connaît la réalité nord-américaine. C’est une question de bon sens » (Fortin). Bon sens ou non, les traducteurs québécois ne sont évidemment pas infaillibles par essence. En effet, dans sa traduction du roman The Street, de Richler, publiée à Montréal en 1969, René Chicoine traduisait notamment « four-year-olds » (The Street : 3) par « gosses » [enfants de quatre ans] (Rue SaintUrbain : 7), « northern Quebec » (The Street : 17) par « Québec-Nord » [Nord du Québec] (Rue SaintUrbain : 23), « Outremont bitches » (The Street : 23) par « chameaux d’Outremont » [salopes dOutremont] (Rue SaintUrbain : 32), « Zion Elders » (The Street : 16) par « Anciens de Zion » [Sages de Sion] (Rue SaintUrbain : 22) et laissait « shortstop » tel quel (Rue SaintUrbain : 82), sans doute parce qu’il n’existait pas encore d’équivalent français. Étrangement, cette traduction datée est celle qu’a reproduit, encore en 2002, la Bibliothèque québécoise…

Bien sûr, les écrivains canadiens anglais ont leur part de responsabilité dans l’opération (surtout ceux qui maîtrisent suffisamment le français pour superviser eux-mêmes la traduction), par exemple en exigeant par contrat que leurs œuvres soient révisées ou traduites par des traducteurs québécois, comme l’ont fait Ann-Marie MacDonald et David Homel. Bien sûr, un auteur comme Richler, dont nous n’avons jamais su avec certitude s’il feignait d’ignorer le français, donne l’impression de se soucier médiocrement de la traduction de ses romans. À Sylvain Houde, il avouait ignorer les « inexactitudes » que nous venons d’aborder et promettait « qu’il en glisserait un gros mot à son éditeur » (Houde). De plus, depuis les années 1960, les traducteurs se succèdent pour traduire Richler en français, toujours avec plus ou moins de succès. On a d’ailleurs laissé entendre, notamment au colloque Odyssée de la traductologie mentionné plus tôt, que Richler faisait la vie dure à ses traducteurs, voire qu’il avait les traductions qu’il méritait. Cela dit, les glissements sémantiques et les non-sens relevés dans Le Monde de Barney montrent combien il est facile de tomber dans les pièges de l’ethnocentrisme. La négation de l’Autre dans la traduction s’avère d’autant plus simple lorsqu’on ne le connaît pas. Comme le souligne amèrement Charlotte Melançon : « Tout n’est pas noir, mais il y a encore beaucoup de choses à améliorer, à changer, notamment l’image que la France se fait de l’Amérique. Toute la question de la traduction en est une d’ouverture à l’autre. Si l’on n’est pas capable d’accepter l’autre, l’étrangeté de l’autre, ce n’est pas la peine de traduire » (Fortin).

  1. 1Cet article est la version remaniée d’une communication présentée au colloque Odyssée de la traductologie, tenu le 21 mars 2003 à la Bibliothèque nationale du Québec (Montréal).
  2. 2Ladmiral emprunte ces termes à Georges Mounin (109 et suivantes) et Eugene A. Nida (159 et passim).
  3. 3Bernard Cohen a surtout traduit des auteurs américains, dont Norman Mailer (Le Combat du siècle), Sam Shepard (Balades au paradis), Walter Mosley (La Musique du diable) et Thomas Harris (Hannibal), mais aussi des écrivains hispanophones, dont Manuel Vázquez Montalbán (Moi, Franco).
  4. 4Martine Wiznitzer a pris la même décision dans sa traduction de St. Urbains Horseman, publiée à Paris en 1976. Elle écrit « St. Catherine Street » (Le Cavalier de SaintUrbain :133), « Rachel Market » (Ibid. :116), « Montreal Royals » (Ibid. : 99), etc.
  5. 5En 1999, Charlotte Melançon, alors vice-présidente de l’Association des traducteurs littéraires du Canada, confiait à Marie-Claude Fortin : « Si l’on traduit “Lower Canada” par “Canada Inférieur”, il est évident qu’on ne connaît absolument rien des réalités canadiennes ! » (Fortin).
  6. 6D’ailleurs, si Cohen avait cherché la Gaspésie sur une carte du Québec, il aurait sans doute évité de traduire « salmon fishing on the Restigouche » (BV 178) par « pêcher le saumon au Restigouche » (MB 258). Restigouche ne désigne ni une technique de pêche, ni un appât autochtone, il s’agit plutôt d’une rivière à saumon réputée située dans la vallée de la Matapédia, en plein cœur de la Gaspésie.
  7. 7« Miguel, c’est le chef au Michelangelo, à Monkland » (MB 378).
  8. 8Ce condensé n’inclut pas les nombreuses incohérences et hésitations entre le français et l’anglais. Ainsi, St Catherine Street Ouest alterne avec Sainte-Catherine (Cohen écrit pourtant Sherbrooke Street West), l’avenue Laurier (MB 330) constitue une surprise et la rue de l’Évêque (MB 579), pour Bishop, un non-sens : elle n’existe pas !
  9. 9On aura reconnu l’Hôpital général de Montréal et l’Hôpital général juif.
  10. 10Bien sûr, il eût été préférable d’écrire « magasin La Baie » ou encore « chez La Baie », expressions plus idiomatiques, quitte à insérer une note du genre : grand magasin canadien (cf. Printemps, La Samaritaine).
  11. 11Au Québec, le terme « Palais de glace » du carnaval de Québec appartient à la culture populaire. Quant au « Grand Théâtre de Quebec City », destiné au « Peuple de Québec » (MB 22, nous soulignons), nous ne savons trop qu’en dire : comme plusieurs, Cohen confond la ville avec la province.
  12. 12Les termes sont compilés dans Termium, la banque terminologique du gouvernement fédéral canadien, et dans la Banque terminologique du Québec (consultation gratuite sur le site www.granddictionnaire.com).
  13. 13Petite épicerie du coin ou de quartier, souvent ouverte à toute heure du jour et de la nuit. Elle dépanne en cas de besoin. Lori Saint-Martin a relevé que ce même mot fut traduit par « crèmerie » dans un roman d’Alice Munro (Fortin).
  14. 14« Parain québécois du parti conservateur » semblait pourtant évident (serait-ce Brian Mulroney, l’ancien premier ministre canadien ?).
  15. 15C’est d’ailleurs ce que Richler voulait dire par « traded » (BV 123). Pour l’anecdote, Chelios fut échangé par Serge Savard, alors directeur-gérant des Canadiens, aux Black Hawks de Chicago en 1990.
  16. 16Au Québec, ce verbe et ses variantes pronominales et passives (se crosser, se faire crosser) signifient duper, se faire rouler ou, dans son acception vulgaire, masturber ou se masturber…
  17. 17Cohen donne au texte français une saveur plus argotique que l’original. Ici, nous pensons par exemple à l’emploi de « grolles » (MB 44) pour traduire « shoes ».