La fin du monde et ses échecs dans le cyberpunk latino-américain

Le cas Santa Clara Poltergeist

Le cyberpunk, sous-genre fantastique qui mélange le monde de la cybernétique et la culture populaire postmoderne, et dont l’exemple le plus facile à saisir pour le néophyte est celui du film des frères Wachowski, La Matrice (à défaut de ne pas être familier avec les noms de William Gibson, Bruce Sterling ou Neal Stephenson), se distingue des thématiques de la science-fiction traditionnelle par le fait d’investir toute la portée historique du présent, plutôt que celle d’un futur lointain (ou passé) de grands empires galactiques et d’épopées cosmiques. L’idée du futur est une idée dépassée dans cet imaginaire contemporain, qui porte également un regard antihumaniste dépourvu de nostalgie et de sentimentalisme. Ainsi, le cyberpunk, comme l’écrit Veronica Hollinger, s’écarte de l’acception eschatologique véhiculée par la science-fiction traditionnelle à caractère humaniste, parce qu’il « est plus engagé dans le processus historique qu’attiré par la transition abrupte des scénarios apocalyptiques qui évitent un tel investissement du changement historique » (McCaffery 1991 : 166). Si la science-fiction humaniste, au même terme que les religions, sectes et mythes populaires, conçoit le moment apocalyptique comme un événement douloureux, mais sotériologique, les cyberpunks portent à l’égard de cette idée transcendantale un regard ironique et ludique. Le cyborg, par exemple, entité mi-humain mi-machine, est déjà en soi une tentative de déjouer la menace d’une punition divine en misant sur la survie de l’espèce humaine dans n’importe quel environnement différent de l’Éden de l’habitacle terrestre ou de la terre éternelle promise ; survie qui transforme les hommes, comme le dit Bruce Sterling, en « monstres pleins d’espoir » plutôt qu’en « zombis bouleversés par le futur » (1987 : 5, 4).

Cependant, cette prétention à l’historicité du cyberpunk est plutôt exclusive des pays postindustriels où, comme le décrit Hollinger suivant Teresa de Lauretis, le contexte historique, politique et personnel est marqué par la technologie (McCaffery : 203). Si à travers la mondialisation la technologie atteint un universalisme spatial et temporaire, celle-ci demeure l’une des ramifications d’un centre économique impérialiste et culturel. Également, c’est dans ce contexte historique qu’il devient possible d’effectuer une scissure (idéologique, après tout) entre les discours populaires et la portée épistémologique des sciences qui nourrissent l’imaginaire de la science-fiction, ainsi qu’entre la sphère publique de la nation et la sphère individuelle. Dans cet ordre d’idées, l’apocalypse s’insère comme un noyau culturel qui motive les réponses de conformité ou de panique des sociétés postindustrielles. Étant donné que le cyberpunk s’attache au moment historique duquel il est issu, il ne cherche pas à le changer : il dépense plutôt son énergie à maintenir le statu quo. D’autre part, il ne s’éloigne pas assez de la position des discours populaires et millénaristes, ainsi que de la tradition humaniste. Ces secteurs réagissent négativement à l’éventuelle fin du monde tel qu’il est, et se contentent de proclamer, au niveau critique, comme l’a mentionné Fredric Jameson dans son analyse du postmodernisme, la mort de plusieurs institutions et la perte d’efficacité de certaines notions héritées de la modernité sans pourtant assister à leur enterrement ou disparition complète.

Dès lors, il convient de se demander si, à côté de l’apocalypse du conformisme et l’apocalypse de la panique, il peut bel et bien exister une apocalypse de la libération et cela, dans le cyberpunk, l’un des genres faisant la chronique d’une période préapocalyptique. Cependant, plutôt que rester dans le corpus du contexte technologique et soi-disant individualiste, j’aimerais diriger l’attention vers une autre zone géographique du cyberpunk. Parallèlement au développement du cyberpunk dans l’hémisphère Nord, dès sa naissance avant-gardiste avec la génération Mirrorshades jusqu’à sa popularité posthume avec la trilogie de la Matrice et ses revirements et alternatives dans le film d’animation japonais, l’Amérique latine incorpore cette modalité de la représentation du moment présent pour l’adapter à sa réalité historique et à l’investissement collectiviste qui semble configurer toutes ses pratiques culturelles et artistiques. Ainsi, on peut présumer que le cyberpunk latino-américain, contrairement à son homologue nordique, établirait une relation de proximité avec cette apocalypse de la libération. Cependant, si l’apocalypse de la libération est envisageable en tant que figure et poétique, il sera pertinent de voir si celle-ci est présente dans la modalité narrative et dans les présupposés critiques qui décortiquent habituellement l’œuvre en provenance d’un contexte collectiviste. J’aborderai donc cette question à travers la présentation générale du cyberpunk brésilien, et plus particulièrement, en m’attardant sur certains passages du roman, Santa Clara Poltergeist (1991) de Fausto Fawcett.

La fin du monde et le syncrétisme : recherche de transformations au-delà de la tradition

Santa Clara Poltergeist met en scène Mateus, un cyborg de race noire résidant à São Paulo, expert en réseaux informatiques et en électronique, proxénète et chasseur de signaux télévisuels flottant dans l’air, les poltergeists. Un accident provoquant la perte du fonctionnement normal de son cerveau, oblige constamment Mateus à charger d’électricité sa prothèse crânienne afin d’atténuer l’impact de ses attaques épileptiques et les excès de sa folie meurtrière. Voulant trouver un remède, Mateus attend avec impatience l’appel de la guérisseuse Sainte Clara Poltergeist dans les images d’un téléviseur hors service. Diva de la pornographie pranayama à Rio de Janeiro, Vera Blumenau/Sainte Clara est une jeune femme blanche, blonde aux yeux bleus, ayant des pouvoirs surnaturels. Ses pouvoirs proviennent également d’un accident : enfant, Vera tombe d’une bicyclette qu’elle a trouvée près d’un gisement de métal inconnu, et dans sa chute, la tige de la selle pénètre son vagin, un incident qui, loin d’être anecdotique, montre déjà le traitement de la sexualité et le corps dans le roman. La rencontre entre les deux personnages arrive très tard, après l’interposition de longues digressions et de longues descriptions saugrenues où sexe et violence sont toujours explicites. Au lieu de recevoir la convocation de Sainte Clara, Mateus reçoit la visite d’un faux poltergeist de la guérisseuse envoyé par un groupe de jeunes scientifiques, les chiites orgoniques, et se voit confier la mission de trouver un ovaire-missile. Ce mécanisme explosera dans moins de dix heures s’il n’est pas désactivé à travers son introduction dans le corps de Sainte Clara. Cette désactivation de l’ovaire-missile fera également disparaître une faille magnétique céleste ayant provoqué la folie collective de Copacabana, faille magnétique qui se dessine dans les limites du surréalisme et de la magie de la réalité tropicale : autour de ces aurores australes flottent des sous-vêtements féminins et des images télévisuelles.

À la fin, malheureusement pour l’expérience de la pensée apocalyptique qui s’annonçait, les amants réussissent à sauver le monde. Après avoir parcouru toutes les rues chaotiques de Copacabana poussés par le compte à rebours de la bombe et par des coups de feu, ils s’adonnent tranquillement à la consommation de leur amour dans une sphère qui est, raconte le narrateur, « une cabine d’autisme » dans un « parc de divertissement cérébral » (Fawcett 177). Après avoir traversé tous les registres de la culture populaire contemporaine, le roman se permet aussi de parodier la « beauté fantasmagorique » du romantisme : un poème de Novalis s’entrecroise à un poème d’un poète symboliste brésilien, Cruz e Sousa, poète de race noire qui entretenait une obsession avec la couleur blanche de la femme rêvée. Le roman satisfait non sans humour cette obsession du poète romantique : l’idylle interraciale des amants. Également, une autre référence intertextuelle consolide cette union : la consommation de l’amour est assurée par un gardien, un golem qui porte toute la lourdeur de « la contre-réalité typique produite par le Verbe qui fait du monde son référent symbolique » (Ibid). Avec l’évocation de ce golem linguistique et représentationnel, l’auteur prend toute la distance possible pour sublimer l’union de Mateus et de Vera dans la conciliation et l’équilibre de forces cosmiques. Au lieu d’aller au-delà de la faille magnétique et de la fragmentation esthétique du roman pour proposer un nouvel état imaginaire, le monde est rétabli dans son ordre et replié sur lui-même. Comme il arrive dans la plupart des narrations classiques où la réalité est sauvée de la menace eschatologique, le « référent symbolique » du roman reste stable pour le confort d’un lectorat national.

Ce roman fait partie de ce que le critique et écrivain brésilien Roberto de Sousa Causo a nommé « tupinipunk ». La partie « tupini- » provient du mot « tupiniquim », terme désignant une tribu indigène de l’état du sud-est brésilien d’Espíritu Santo. « Tupiniquim » est devenu un synonyme dans la langue courante pour tout ce qui relève d’un caractère brésilien. Le terme tupinipunk répond donc à un intérêt de revêtir d’une spécificité nationale un genre arrivant très vite au Brésil et produisant un premier roman à une époque où le pays commence à s’ouvrir à la démocratie après 21 ans de dictature. En 1985, Alfredo Sirkis publie le premier roman tupinipunk, Silicone XXI, un roman à l’intrigue détectivesque où la figure du militaire est parodiée. En 1991 apparaît le roman de Fausto Fawcett, Santa Clara Poltergeist, et en 1994, un troisième roman vient à compléter le corpus romanesque : Pyrites sidérales : romance cyberbaroque, de Ghilherme Kujawski, où se présente un mélange curieux de religion afro-brésilienne, d’humour noir et de contes de fées. À côté de ces trois romans emblématiques, Roberto de Sousa Causo mentionne quelques nouvelles écrites par André Carneiro, Braulio Tavares, Ivan Carlos Regina et Ivanir Calado ayant des traits communs avec une esthétique tupinipunk.

La définition du tupinipunk se fait, en principe, par une opposition au cyberpunk américain. Causo affirme que les deux mouvements sont des réponses formulées à partir de deux pôles opposés de la modernité à une situation commune qui est la mondialisation et le multiculturalisme (1996). Tandis que le cyberpunk américain est une tentative d’extrapolation de la mondialisation et de la révolution informatique, le tupinipunk serait « une tendance spontanée à l’intérieur de la science-fiction brésilienne » qui opère selon les critères de sa propre tradition. Parmi ces critères, Causo trouve dans la notion de syncrétisme une spécificité du sous-genre. C. Rivière explique la signification de ce mot emprunté à l’anthropologie des religions :

Ce terme qui, chez Plutarque, désigne le front uni des cités de la Crète habituellement rivales, engagées ensemble dans la lutte contre un ennemi extérieur, renvoie désormais, non plus au résultat d’un accord volontaire, mais à l’amalgame d’éléments mythiques, culturels ou organisationnels de sources diverses au sein d’une même formation religieuse. Autrefois considéré comme un produit hybride […], ou comme un compromis de décadence, altérant une pureté religieuse originelle […], le syncrétisme est désormais reconnu comme un processus contre-acculturatif impliquant manipulation de mythes, emprunt de rites, association de symboles, inversion sémantique parfois et réinterprétation du message christique (Bonte, Izard 2004 : 692).

Dans le cas du Brésil, le syncrétisme renvoie au phénomène du candomblé, étudié notamment par Roger Bastide, une religion qui a incorporé à travers les siècles les croyances de plusieurs ethnies africaines déportées au Brésil, les images du catholicisme et quelques déités amérindiennes. Le syncrétisme, dans un sens plus large, sert également à décrire des aspects culturels ainsi que des systèmes politiques. En partant d’une définition du dictionnaire où le syncrétisme est associé aux idées de « réunion artificielle d’éléments disparates », Causo affirme que :

La condition périphérique du Brésil se reflète dans le syncrétisme, comme le moyen d’une appropriation culturelle sans racines, sans une compréhension profonde de la culture « contribuable », une culture employée sans que nous lui rendions hommage (3).

La problématique du syncrétisme du tupinipunk réside, d’après Causo, dans la conciliation prônée par la tradition politique qui cherche à souder les éléments hétéroclites de l’ensemble culturel brésilien sans pourtant résoudre les conflits de base. Ainsi, à la fin de son article Causo conclut que :

La plupart des œuvres tupinipunk est malheureusement encore du côté de la conciliation, en renforçant des mythes anciens, au lieu d’en créer, en accommodant des tensions sociales et culturelles sous la forme d’allégories carnavalesques et de batuques [pastiches] stylistiques, au lieu de les examiner à fond dans leurs présences formatrices de la réalité brésilienne, et de leur interface avec la réalité internationale (Ibid. : 12).

L’étroitesse de l’horizon utopique du corpus tupinipunk mène Causo à proposer d’autres modèles, même si ceux-ci viennent en partie de l’étranger. En profitant d’une référence à son terme tupinipunk inscrite dans un compte-rendu du roman de Richard Kadrey, Kamikaze l’Amour (1995), pour la revue Locus – The Newspaper of Science Fiction Field, Causo entrevoit une pratique plus engagée dans un cyberpunk qui dépasserait les frontières états-uniennes et brésiliennes. L’auteur du roman La stratégie Ender (Ender’s Game – 1985) Orson Scott Card, qui a séjourné au Brésil en qualité de missionnaire mormon, a publié la nouvelle « America » (1990), dans laquelle Causo voit une clef de « transformation », plutôt que de « conciliation ». Dans ce récit, l’union d’un adolescent nord-américain mormon et d’une indigène brésilienne permettra la naissance d’un libérateur des peuples exploités par le colonisateur européen, ce qui produira une libération de l’histoire. L’autre texte auquel Causo fait allusion est le roman Through the Arc of the Rain Forest (1990) de Karen Tei Yamashita, une Nippo-Américaine résidant au Brésil. Pour Causo, ce roman « exquis écrit par quelqu’un dont seulement la tierce partie est brésilienne » :

représente les meilleures possibilités du tupinipunk : un cyberpunk à solutions tiers-mondistes, souffrant pour s’intégrer à un monde marqué par le capitalisme globalisé qui peut engloutir même les préoccupations environnementales, l’identité culturelle et individuelle (Ibid. : 11).

En parodiant des feuilletons de la télévision brésilienne et les Tristes Tropiques de Lévi-Strauss à travers les mécanismes narratifs du roman, Yamashita substitue les thématiques générales du cyberpunk par des images plus « brésiliennes » : au lieu d’une technologie de la communication, les pigeons voyageurs deviennent la nouvelle obsession mondiale ; les drogues perdent leur popularité devant « l’auricupulture » avec des plumes d’oiseau ; et la panacée technologique des implants est remplacée par une sorte de caoutchouc miraculeux. Ces exemples étrangers de « transformation » restent cependant des idéaux à atteindre pour le tupinipunk, tout comme la potentialité politique que l’on veut voir dans l’œuvre artistique, alors que celle-ci reste déterminée par des structures profondes, comme celle des « mythes nationaux ».

Le mythe national : jusqu’à l’épuisement des allégories de lecture

Mary Elizabeth Ginway dans Brazilian Science Fiction. Cultural Myths and Nationhood in the Land of the Future trace l’évolution du genre depuis les années 1960, où les auteurs cherchent à affirmer les mythes de l’identité brésilienne à travers une science-fiction apolitique et antitechnologique—continue avec les années 1970, où la dictature oblige les écrivains à se servir de la dystopie et des mythes nationaux pour critiquer les méfaits du régime tels que l’industrialisation, l’urbanisation et la répression—et finit avec un panorama des quinze dernières années du XXe siècle, période dans laquelle l’expérience de la postdictature apporte une vision plus complexe des problèmes sociaux. D’après Ginway, cette génération « commence à déconstruire les notions d’identité et à offrir à la science-fiction de nouvelles perspectives et approches » (2004 : 34). Le travail de Ginway, étudiant la science-fiction brésilienne en se servant, d’une part, des paradigmes de la science-fiction anglo-américaine et, d’autre part, des mythes nationaux brésiliens, pourvoit un regard unique sur la métamorphose moderne du Brésil (Ibid. : 13-14). Ce constat mène à une recherche à la fois iconographique et symbolique. Ginway se base sur une définition de la science-fiction qui concerne plutôt les icônes qu’une notion traditionnelle telle que la « distanciation cognitive » de Darko Suvin. Ainsi, abordant l’étude des icônes proposées par Gary K. Wolfe telles que le robot, l’extraterrestre, le vaisseau spatial, la ville, et le terrain vague, Ginway montre comment les écrivains brésiliens des années 1960, par exemple, utilisent le genre pour résister à la modernisation et réaffirmer une identité « humaniste, féminine et non blanche » (88) à l’égard d’une science-fiction anglo-américaine scientifique, masculine et blanche des années 1930 à 1960.

L’autre aspect iconographique et symbolique se trouve dans les mythes nationaux brésiliens. Dans les mythes les plus récurrents apparaît l’image du Brésil comme un paradis tropical, une démocratie raciale de gens dociles et sensuels (Ibid. : 16). Le Brésil édénique entre très tôt dans l’imaginaire européen avec les premières chroniques de la découverte et la colonisation du territoire sud-américain. Cette topique fait référence aux éloges de la nature tropicale et à la disposition de la terre à l’agriculture que font les chroniqueurs portugais des XVIe et XVIIe siècles. Le Paradis est aussi celui où règne une harmonie raciale. Durant le Romantisme, José de Alencar écrit Iracema (1865), un récit qui évoque la liaison d’un soldat portugais et d’une indigène durant la période coloniale. L’héroïne virginale de cette histoire devient symbole de la fertilité d’une terre qui n’attend qu’à être conquise par le colonisateur lusitanien, rejoignant ainsi une topique de la littérature latino-américaine du XIXe siècle de l’idylle interraciale en tant qu’allégorie de la consolidation nationale. Au-delà de cette idylle symbolique euro-amérindienne, l’histoire montre cependant que la réalité du métissage définit surtout les rapports entre les Européens et les esclaves africains. L’interaction qui s’établit, à partir des plantations de cannes à sucre, entre les patrons et les esclaves (Casa Grande et Senzala) jusqu’à l’abolition de l’esclavage en 1888, de même que l’émergence d’une population métisse qui devient l’intermédiaire entre les strates supérieures et inférieures de la société consolident le mythe de la démocratie raciale.

C’est grâce au « continuum racial » du métissage que les Noirs peuvent atteindre certaines positions sociales et certains emplois. Livio Sansone commente ainsi que les classes défavorisées profitent encore de l’existence du mythe pour minimiser les désavantages que cause la différence de la couleur de la peau à travers des pratiques culturelles et des stratégies individuelles. Malheureusement, dans certaines situations, ces stratégies sont associées à des tentatives de manipuler l’apparence physique dans la vie quotidienne (par exemple, le lissage des cheveux), ce qui confirme la supposition qu’au Brésil existe une incompatibilité entre le fait d’être Noir et les avantages sociaux (2003 : 2). De plus, Robert DaMatta explique le mythe de la démocratie raciale en termes d’occultation des injustices sociales commises envers les Noirs, les Amérindiens et les Mulâtres (Ginway : 20).

Un autre mythe qui se fait incontournable pour caractériser la société brésilienne est le carnaval, à travers sa représentation de la sensualité et le bonheur des gens qui y participent. Mais, en suivant DaMatta, Ginway écrit à propos du carnaval : « même si cette célébration semble mettre en premier rang de la culture brésilienne la femme, les Noirs et les classes défavorisées, il affirme que la fonction latente du carnaval est de persuader ces secteurs de la société de retourner à leur position subalterne » (20-21). Le rôle du carnaval, outre l’idéalisation que Mikhaïl Bakhtine fait de sa fonction subversive dans la culture du Moyen-âge européen, a été contesté par Umberto Eco, qui remarque que la comédie et le carnaval mêmes ne sont pas des « transgressions réelles », car ils sont des exemples de « renforcement de la loi » et rappellent « l’existence des règles » (Erisman 1995 : 336). Contrairement à un monde à l’envers, où tout ce qui était en bas montait au trône en même temps que les figures du pouvoir étaient parodiées par des fantoches, et où les classes aisées couraient des risques—au XIXe siècle, au Brésil, le rituel de l’entrudo, consistant à se lancer de l’eau pour purifier le corps, a été interdit à cause de sa violence—, le carnaval est une simulation qui reste circonscrite à un espace surveillé et dépendant du calendrier de la religion officielle.

Cependant, le carnaval renvoie à une étymologie obscure—avaler de la viande, selon certains, ou enlever de la viande, selon d’autres—et entretient un rapport direct avec le corps, ce qui pourrait définir le tupinipunk comme un cyberpunk carnavalesque. Pour Ginway, la sexualité joue un rôle central dans la différenciation entre le cyberpunk (anglo-américain) et le tupinipunk. Le tupinipunk insiste sur la sexualité et la violence physique d’où résulte que les événements se déroulent dans le milieu urbain plutôt que dans l’espace virtuel. Également, le tupinipunk présente le corps comme un site de résistance culturelle (Ginway : 152), et c’est ainsi que les notions de carnaval et de carnavalesque deviennent importantes dans la critique sociale du mythe de l’identité brésilienne. Ginway s’appuie sur le travail de Stallybrass et White sur la carnavalisation et le corps en tant qu’emplacement d’un conflit entre la culture d’élite et la culture de masse. Dans ce conflit figurent un « impératif politique de rejet » et un « désir de l’Autre » (Ginway : ibid.). Elle montre alors que le tupinipunk n’échappe pas à la chosification du corps du Noir telle qu’elle est abordée dans le carnaval au Brésil. Ainsi, d’après Ginway : « La symbolique du corps du Noir ne disparaît pas chez les auteurs tupinipunks (des Blancs) qui mettent l’emphase sur l’aspect physique et la négritude pour identifier le Brésil comme un pays du tiers monde dans l’ordre mondial et pour examiner les hiérarchies sociales et raciales au Brésil » (Ibid : 155). Le brouillage momentané effectué par le carnaval dans le binarisme du système de l’ordre social ainsi que le désir de l’Autre racial s’appliquent aussi au traitement de la sexualité féminine dans le tupinipunk. Les trois romans principaux du genre—Silicone XXI, Santa Clara Poltergeist et Pyrites sidérales—, écrit Ginway, offrent une résistance à la « pénétration du capital et de la culture américaine » ainsi qu’à la structure sociale brésilienne à travers la mise en scène des couples ou duos formés par un personnage masculin de race noire dépeints non sans un certain primitivisme—comme les états épileptiques et sadiques de Mateus—et une compagne blanche ou de carnation plus pâle.

Dans le tupinipunk, l’apocalypse est entrevue comme un moment historique menaçant—« la pénétration du capital et de la culture américaine »—en ce qu’il oppose une stratégie à double tranchant : les pratiques syncrétiques et la récurrence des mythes nationaux. La faille sur l’horizon doit disparaître parce que c’est le corps des personnages qui devient l’icône du tupinipunk et le lieu d’inscription vernaculaire et symbolique d’une autre apocalypse. Dans Santa Clara Poltergeist, le narrateur élabore la meilleure définition de l’apocalypse charnelle et carnavalesque spécifique au tupinipunk : « Ce que Mateus y voit, c’est cinq filles nues totalement traversées par des épingles d’acupuncture grand format. Elles ont l’air des oreillers de chair punk ou de n’importe quelle tribu transformées en brochettes humaines » (Fawcett : 72). Cette apocalypse corporelle a lieu dans un plan immanent qui traverse l’histoire, vue comme un monument monolithique, pour la rendre une surface stratifiée :

Tous les rêves métaphysiques provoqués, touchés par la science à travers un accident déclenché par les orgoniques. Tous les Bouddhistes, les Platoniciens, les Taoïstes, les Chrétiens, les Spirites, les Musulmans, les Pranayamiques, les Juifs, les Aristotéliciens, les Humanistes, les Marxoїdes, les Freudiens, les Jungiens, les critiques logiques, les modernes, les cryptes, les post, les pré, les mystiques de toutes les couleurs humiliés et avec l’enveloppe de l’âme/corps déchirée par la furie apportée par la faille magnétique basse qui ouvrit avec obscénité les portes de la perception, en faisant ressentir dans la chair des gens l’adhérence de l’invisible au visible, de ce que l’on peut comprendre à tout ce que l’on ne peut pas comprendre. L’adhérence dans la chair de tout ce que l’on peut ressentir et ce que l’on ne peut pas ressentir, tout ce que l’on peut penser et ce que l’on ne peut pas penser. Comme dirait Novalis. Tous les mysticismes humiliés par la promiscuité quantique, toutes les créations palliatives de l’homme en termes de conscience et de morale humiliées. Il y a trop de technologie pour s’accrocher à cette dimension et pour essayer de maîtriser la situation (129).

Montrant comment il existe encore des discours institutionnels prétendant réglementer le sexe, Fawcett célèbre la portée allégorique de cette énergie qui se transforme constamment : de la « faille magnétique » à « la promiscuité quantique », du fer instable « pré-Big-Bang » au corps (in)discipliné de l’être humain. Fawcett semble suivre ici Foucault, mais aussi, comme il est annoncé dans la préface du roman, la vision cosmique de l’érotisme de Bataille ou la mystique vide et complètement syncrétique de Rajneesh. Également, les applications des propos deleuziens sont bienvenues. Il n’est pas seulement question de « machines désirantes », de passages d’une strate « moléculaire » à une strate « molaire », mais aussi de « Corps sans Organes » s’insinuant dans les opérations érotiques que réalisent les mulâtresses de l’Oba Oba, lesquelles introduisent l’ovaire-missile dans le corps de Vera. Là où Deleuze et Guattari suivent le programme de coutures d’anus et de bouches pour obtenir un « CsO » dans Le Festin nu de Burroughs (Deleuze et Guattari 1980 : 186), Fawcett offre la possibilité aux clients de « frotter leurs queues au bout de la digestion des mulâtresses, où naissent les premières fèces » (171).

Évidemment, il est facile ici d’évoquer le lien paronymique entre la scatologie qui résulte de cette scène et l’eschatologie qui se dessine avec opacité dans les actions du roman. Entre la malléabilité du corps grotesque et la figuration d’une fin de l’histoire, on peut se référer à l’allégorie comme « fond obscur » et « forme d’expression primitive » chez Walter Benjamin (1985 : 173). Ainsi, le corps et sa sexualité fonctionnent comme le lieu où accomplit son travail une physis ou histoire de la nature. Il ne s’agit pas d’une histoire culturelle, si proche de la figure rhétorique du symbole et de l’idée romantique de la nation. Cette histoire de la nature, que Benjamin voit dans l’étude du drame baroque allemand, dépasse le cadre temporaire de la moralité et de la construction d’une histoire particulière et politique. Au contraire, « l’histoire-nature » pénètre dans les théâtres de l’histoire et laisse des ruines, où les hommes deviennent, avant tout, des créatures et leurs corps, des significations scripturaires (234). Cela, dans Santa Clara Poltergeist, héritière lointaine du Baroque, apparaît lorsque l’on voit les créatures se déchirer dans une orgie, manger leurs corps dupliqués et à saveur de fruits, et former avec leurs organes génitaux des abécédaires mystiques.

Mais la faille de l’allégorie sexuelle dans Santa Clara Poltergeist se trouve dans l’absence d’érotisme et la stase industrialisée de l’énergie qui le produit. La distinction entre érotisme et pornographie est très mince et son interprétation relève de l’intervention provenant du domaine politique, juridique, culturel, etc. Une définition peut quand même apporter un éclaircissement : Alain Robbe-Grillet a écrit que : « la pornographie est l’érotisme des autres » (Ferreira-Pinto 2004 : 50). Au Brésil, le sociologue Carlos Roberto Wrinckler a précisé le rôle du phallus et de sa domination des Autres : « le phallus est le symbole du pouvoir capitaliste patriarcal » (Ibid. : 51). Entre l’érotisme « des Autres » et le pouvoir capitaliste patriarcal du phallus, Fawcett utilise la distance que lui confère son narrateur plus préoccupé à agencer le collage et à parsemer le texte de clins d’œil sexuels. Cette distance par rapport à l’objet pornographique peut faire paraître érotique n’importe quel écrit de tendance plus conservatrice, même si Fawcett semble être à l’avant-garde avec sa représentation du corps de Mateus—dont la sexualité est décrite d’une manière inquiétante : pénis en forme de poisson sans œil—, rendant ainsi étranger le phallus symbolique et fomentant la perversité avec laquelle le capitalisme patriarcal blanc configure les identités et les rôles sexuels.

Dans Santa Clara Poltergeist, le regard social masculin préfère rester dans une contemplation distante où il peut jouir du fantasme du sexe interracial de l’Autre-Noir et de l’Autre-Femme ainsi que du démembrement et de la passivité de Vera. Le démembrement de Vera produit une allégorie unilatérale consistant non seulement dans la correspondance de l’exposition graphique et verbale des organes génitaux d’une femme blanche, mais aussi dans la préfiguration de la vraie sainte « patronne des coïts » sous plusieurs vocables : la jeune fille qui se fait rentrer la tige de selle dans le vagin ; la strip-teaseuse des camionneurs ; le faux poltergeist qui fait jouir Mateus ; l’élève modèle de Ramayana ; la Santa Clara des légendes du Moyen-âge ; les femmes proto-vikings qui habitent dans un monde parallèle ; les mystérieuses poupées que Mateus retrouve dans son chemin ; Xuxa, Madonna, Olivia Newton-John ; « des beuglantes » de blonde ; etc. Et malgré cette mobilité allégorique, on ne peut pas dire s’il s’agit d’un « devenir-femme ».

Comme réaction à la séparation du public et du privé dans le premier monde, Fredric Jameson a proposé le terme « d’allégorie de la nation » pour se référer à une fonction exclusive des littératures du tiers-monde. Malgré le geste réducteur de telle proposition, en plus de centraliser l’allégorie laquelle devrait toujours déjouer l’exercice herméneutique, il peut être lu à côté d’un autre énoncé proposé par Hermano Vianna dans la préface du roman : « la plupart des écrivains cyberpunk […] est constituée par des individualistes naïfs qui croient à cette morale de l’histoire : chacun est propriétaire de son nez. Fausto, au contraire, est un écrivain qui ne veut pas faire la morale aux lecteurs » (8). Dans une théorisation politique du corps, un nez n’appartient pas uniquement à l’individu, car les discours et les pratiques sont toujours en train de construire et façonner la corporéité. L’écrivain ne peut pas faire une morale de l’histoire par lui-même, car l’allégorie de la nation est toujours en train d’inscrire ses propos dans un cadre sociopolitique. C’est le cas de l’allégorie dans les travaux artistiques du tropicalismo et dans les textes dystopiques durant le régime militaire (Dunn 1999 : 243). À travers des histoires allégoriques, des jeux de langage, de l’absurde et des catachrèses 1, les artistes déjouent l’exégète officiel. Pourtant, la réflexion de la nation était présente dans le fait de proposer une idée de nation différente de celle du groupe au pouvoir 2. Dans Santa Clara Poltergeist, l’allégorie de la nation est également fonctionnelle, bien que différemment ; elle peut se lire ainsi : l’allégorie de la nation dans Santa Clara Poltergeist montre, d’une part, que l’allégorie n’est pas efficace en termes sexuels, car elle stagne dans le symbole—son contraire moderne—et dans le mythe—son contraire historique. D’autre part, le national, c’est-à-dire, l’objet symbolique inclus dans la démocratie raciale de la nation, mais socialement exclu (le Noir, la Femme), est devenu une source d’inquiétante familiarité à cause des principes démocratiques à l’ère de la postdictature et des paysages idéologiques de la mondialisation obligeant le sujet de la nation à regarder autrement cette réalité.

D’un point de vue déconstructionniste, Santa Clara Poltergeist est une allégorie de la lecture de l’histoire du national à travers le symbole de la femme. La théorie de la textualité explique qu’un récit raconte sa propre lecture et ses lectures erronées ainsi que sa propre déconstruction à partir d’une figure ou une série de tropes (De Man 1989 : 250). Dans Santa Clara Poltergeist, cette figure est la femme ; figure qui est réduite, non à une subjectivité, mais à un statut de sexualité et de textualité : le roman raconte l’histoire de Santa Clara Poltergeist comme en témoigne son titre ; titre qui, par ailleurs, ne porte ni le symbole du phallus—Silicone XXI—ni celui du capital—Pyrites sidérales. Les lectures erronées—la mienne y comprise—s’approprient le texte et sa sexualité pour inscrire l’interprétation dans un cadre historico-institutionnel. C’est précisément l’histoire que Fawcett raconte malgré lui : l’histoire de l’appropriation d’une figure à travers l’impossibilité de la lecture de son roman. L’ovaire-missile qui parcourt les rues de Copacabana raconte l’histoire de la transformation d’un mythe national : la fertilité de la terre incarnée par la femme indigène dans le cadre historico-institutionnel (post)colonial devient une métonymie du capital technologique et médiatique. Santa Clara Poltergeist, sainte et putain en même temps, est une institution de la société du spectacle et de la domination dont le texte fait une historiographie fantastique de l’eutopie/dystopie afin d’oublier un instant la « normalité médiocre » (Fawcett : 174) du présent réel—celui de la vraie violence, de l’exclusion, de la prostitution infantile et des favelas—où l’apocalypse de la libération apparaît comme un horizon figurable, mais toujours inatteignable.

Lectio divina : vers une nouvelle conception du collectif

Épuiser les niveaux de lecture d’un texte aussi hétéroclite et décousu que Santa Clara Poltergeist afin de trouver une actualisation de la promesse apocalyptique oblige à délaisser tout l’appareil critique dans lequel figure la nation comme centre mythique et symbolique structurant. Ce problème commence dès la réception du texte, réception conditionnant une critique tautologique et à la fois institutionnalisée : on lit Santa Clara Poltergeist comme un produit déterminé, un roman brésilien qui parle, en portugais, d’un Brésil en changement, mais demeurant toujours le même. Ce niveau d’analyse n’est pas fautif, car il dégage les substrats nationaux inconscients du texte, mais plusieurs limitations se présentent à la valorisation de la charge épistémologique du fait littéraire et du contenu libérateur et utopique que devrait posséder en forme allégorique et idéale toute œuvre d’art. L’allégorèse, ou la recherche critique de cette forme allégorique, devrait mener à repérer des propositions utopiques résultant d’une apocalypse de la libération. Ceci paraît impossible dans un roman comme Santa Clara Poltergeist, mais cette impossibilité est une invitation à percer le texte différemment.

À partir de son étymologie, on associe l’utopie à l’imagination d’espaces à l’intérieur desquels une communauté (la cité, la fraternité ou la nation) sera bâtie selon une série de principes morales, politiques et économiques. La concrétisation des projets provenant de la modernité a entraîné également la création des termes servant à évaluer la qualité des résultats de ces projets ou à faire l’apologie ou la mise en garde de leur mise en place. Ainsi, on arrive à une dichotomie entre une eutopie (une bonne utopie, ou suivant l’étymologie, un bon lieu) et une dystopie (une mauvaise utopie, un mauvais endroit). Cependant, cette dichotomie entre « le bien » et « le mal » qui sert à caractériser les espaces n’approfondit pas dans la complexité de l’œuvre littéraire où l’idée d’une société meilleure ou pire a été conçue. Ernest Bloch dans Le principe espérance, ouvrage encyclopédique qui montre comment toutes les pratiques culturelles, de la plus banale jusqu’à la plus suspecte, sont animées par un élan ou impulsion utopique. Se référant à cet ouvrage, Fredric Jameson dans Archaeologies of the Future (2005) plaide pour une méthode herméneutique permettant de distinguer entre l’impulsion omniprésente et le texte utopique en soi. Jameson considère que la proposition de Bloch est novatrice dans sa manière de trouver l’impulsion utopique dans des endroits inattendus (3), mais l’analyse se heurte au moment de déterminer quel est l’élan utopique d’un texte qui traite des utopies. Jameson revient à la technique allégorique pour enchaîner l’expérience individuelle présente dans le texte et la collectivité, en passant par le corps et la temporalité. Cela peut être mieux expliqué par le tableau offert par Jameson (9) :

Le collectif (anagogique) Temporalité (moral) Le corps (allégorique) Investissement utopique (le texte)

Jameson place dans les trois aspects supérieurs—le corps, la temporalité et le collectif—les niveaux de l’allégorie contemporaine (6), alors qu’il emprunte des termes techniques et la manière de les diviser à la lectio divina, une méthode provenant de l’exégèse biblique. Ainsi, les niveaux qu’il propose correspondent aux quatre sens des Saintes Écritures. Tandis que l’allégorique, le moral et l’anagogique font partie du sens spirituel, le texte resterait dans le niveau historique, dans lequel se trouvent les formes conventionnelles d’analyse : interprétation parabolique (intention de l’auteur), étiologique (étude de l’énonciation), et analogique (étude des parties du texte). La nation, comme on l’a vu, ainsi que ses implications pour le corps et la temporalité, ont été subsumées dans ce premier niveau, laissant les autres trois dépourvus d’un sens du signe apocalyptique, et se privant également d’un nouveau sens du collectif plus prometteur. Ainsi, la faille magnétique dans Santa Clara Poltergeist, malgré tout le roman et les dispositifs critiques qui le conditionnent, devra se voir comme le seuil d’une nouvelle modalité de pensée.

  1. 1Figure rhétorique consistant dans un éloignement abusif du sens originaire d’un mot ou d’une idée.
  2. 2Pour Roberto Schwartz, le tropicalismo produit une « idée atemporelle du Brésil » (Dunn, Ibid.).